Chine : Un journaliste risque la prison à vie pour avoir publié un document lié au massacre de la place Tiananmen

Le 28 janvier, le procureur de Changsha (sud du pays) a accusé le journaliste et poète Shi Tao de « divulgation illégale de secrets d’Etat à l’étranger ». Il risque de trois ans de prison à la perpétuité pour avoir publié sur Internet un document sur le massacre de la place Tiananmen de juin 1989. Quelques jours plus tôt, un autre journaliste dissident avait été placé en liberté provisoire après un mois de détention.
Reporters sans frontières est indignée par l’acte d’accusation contre Shi Tao transmis par le procureur chinois à la justice. Alors que l’Union européenne (UE) envisage de lever l’embargo sur la vente d’armes imposé après le massacre de la place Tiananmen, l’emprisonnement d’un journaliste qui a tenté d’informer l’opinion publique internationale sur la répression constante des manifestants de 1989, est absolument scandaleuse. Elle montre avec quelle violence le Parti communiste chinois refuse toute ouverture. Reporters sans frontières va demander que le cas de Shi Tao soit évoqué lors de la prochaine réunion du dialogue UE-Chine, les 24 et 25 février au Luxembourg.
Le 28 janvier 2005, le bureau du procureur populaire de Changsha a transmis l’acte d’accusation retenu à l’encontre de Shi Tao, du quotidien Dangdai Shang Bao (Les Nouvelles du commerce contemporain), publié dans cette province du Hunan. Le journaliste est accusé d’avoir « divulgué illégalement des secrets d’Etat à l’étranger », en publiant un document officiel et des articles sur des sites Internet et des forums de discussion basés à l’étranger. Shi Tao a envoyé, en avril 2004, au quotidien dissident en ligne Min Zhu Ton une note interne transmise à son journal par les autorités. Celle-ci mettait en garde les journalistes contre les dangers d’une déstabilisation sociale et les risques liés au retour de certains dissidents à l’occasion du quinzième anniversaire du massacre de la place Tiananmen.
Shi Tao a publié ce texte sous un pseudonyme, mais des agents du ministère de la Sécurité d’Etat l’ont identifié grâce aux filtres installés sur l’Internet chinois. La Sécurité d’Etat a affirmé au procureur qu’il s’agissait d’un document « Jue Mi » (top secret). Selon son avocat, Shi Tao a reconnu avoir envoyé ce document mais a contesté son caractère secret.
Le 25 janvier, Shi Tao a reçu la visite de son avocat, Thomas Guo, qui a affirmé que le journaliste était en bonne santé physique et mentale. « La loi sur les secrets d’Etat n’est pas bien définie. Par conséquent, l’interprétation et l’extension du concept des soi-disant secrets sont floues. Il est donc très facile pour les autorités d’utiliser cette loi contre les journalistes qui ont du franc-parler », a déclaré l’avocat.
Shi Tao est actuellement détenu à Changsha après avoir été arrêté le 24 novembre 2004 à Taiyuan, dans la province du Shanxi (Nord-Est). Au moment de son interpellation, les agents ont demandé à Wang Huan, son épouse, de n’avertir personne, surtout pas les médias, sinon son mari serait maltraité.
Par ailleurs, la police a placé en liberté provisoire, le 25 janvier 2005, le journaliste dissident Yang Tianshui, après un mois de détention à Hangzhou, chef-lieu de la province du Zhejiang (Sud-Est). Il reste poursuivi pour « incitation à la subversion d’Etat ». Il doit rester à la disposition de la justice et résider chez sa soeur qui s’est portée garante pour sa libération. Reporters sans frontières réitère sa demande de lever toutes les charges qui pèsent contre le journaliste.
Yang Tianshui a publié de très nombreux articles sur Internet, mais également dans la version chinoise du quotidien Epoch Times, édité à l’étranger. Récemment, le journaliste a rédigé des articles sur les tortures que subissent les défenseurs des droits de l’homme et sur la protection apportée par les autorités à certains criminels.
                                                            
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Reporters sans frontières
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