De Frères sans frontières à E-changer

Sergio Ferrari, quel est votre parcours journalistique ?

Au niveau de ma formation, je suis historien. Dans les années 80, je me suis tourné vers le journalisme. A l’époque, j’étais volontaire de Frères sans frontières- l’actuel E-changer. De 1980 à 1992, je travaillais au Nicaragua en tant que responsable de relations internationales et rédacteur de l’Agence Nouvelle Nicaragua (ANN), l’agence non officielle du pays. De plus, la création de la revue « Envio », institut historique centro-américaine de Managua a constitué l’un des points essentiels de ma collaboration sur place. En fin de compte, en tant que correspondant pour plusieurs journaux en Amérique Centrale, j’ai beaucoup collaboré avec les médias sur place.

A mon retour en 92, mon activité professionnelle est restée dans le domaine du journalisme, notamment en devenant responsable de presse et de la communication d’E-changer. Le reste du temps, je suis freelance d’une dizaine de revues soit de Suisse, soit d’Europe comme Selvas (http://www.selvas.org/). L’autre niveau de mon activité s’est axé  autour du rôle de correspondant en Suisse pour une demi-douzaine de journaux d’Amérique Latine. Ce travail consiste à créer un pont informatif à propos de l’actualité de la Suisse et de l’Europe. A l’inverse, je traite l’actualité de l’Amérique Latine en Suisse.

En tant que personne impliquée dans l’organisation d’E-changer, comment définiriez-vous cette ONG ?

Avec 40 ans d’existence, E-changer a beaucoup progressé. A l’origine, c’était une organisation missionnaire, dans les années 50, une organisation liée à l’église catholique romaine- presque caritative. Dans les années 80, une transition s’est opérée à partir de l’expérience d’une vingtaine de volontaires au Nicaragua à l’époque du Sandinisme. Une réflexion de base s’est effectuée sur notre position en tant qu’organisation de coopération solidaire. Un processus de transformation profonde a donc débuté.

Maintenant je définirais E-changer comme une organisation de coopération solidaire. Cela signifie une vision de coopération : « cooper-action », de relation entre paires, de relations horizontales entre acteurs du Nord et du Sud, prônant un échange permanent de ces acteurs en garantissant un pont entre la société civile du Sud et celle du Nord. L’aspect le plus riche, à mon avis, est celui d’une organisation porteuse de tout un débat et de toute une réflexion en arrière-plan. On n’accède pas à des mythes, mais on met en question certains paradigmes de l’action sociale.

Du fait que nous nous basions sur l’idée d’échange entre les personnes, cela humanise énormément les relations engendrées. D’ailleurs, l’expérience actuelle d’E-changer au Brésil démontre bien ce que nous sommes sur le point de construire.

Dans les années 80, il y a eu un changement de philosophie. Quel est-il exactement ?

Nous avons vécu le passage d’une organisation très humaniste, très chrétienne avec tout ce que cela signifie, c’est-à-dire beaucoup de paternalisme et de rigidité finalement, à une organisation active dans la société civile suisse. Cela signifie qu’on a dû revoir les paradigmes d’action que nous développions. Comment changer cette vision paternaliste par exemple ? Nous avons donc opté pour la construction d’une vision de coopération horizontale. L’idée de transfert a généré une mise en place d’un système de partenariat entre le Nord et le Sud. Ensuite il nous a fallu revoir le concept d’envoi de volontaires. C’est justement là où nous sommes retombés dans une logique d’échange de personne et de savoirs. Une fois sur place, le volontaire est accueilli par des acteurs du Sud dans un cadre donné par des Hommes sur place.

Politiquement, nous avons considéré la société civile comme une réalité, les mouvements sociaux comme un moteur clé de cette même société. Malgré notre petite taille, nous cherchons à renforcer ces acteurs qu’ils soient au Nord ou au Sud. E-changer travaille donc de consort avec des partenaires très engagés dans leur pays au niveau de la transformation de la réalité sociale et économique du Sud. Cette ONG participe aussi très activement à ce qui se fait au niveau du forum social suisse et européen. Finalement notre nom synthétise bien cette évolution. Nous sommes passé de Frères sans frontières à E-changer, d’une structure quasi missionnaire à un organisme prônant le changement social.

Au niveau financier, il nous était beaucoup plus facile d’être lié à l’église. Lorsque nos partenaires sont devenus des organisations sociales du Sud, sans argent, nous avons dû développer toute une recherche de fonds. A noter encore, le cofinancement de la DDC a commencé avant que nous transformions E-changer ; c’est-à-dire dans les années 75. A l’époque, la coopération officielle suisse s’est tournée plus volontiers vers des organismes indépendants pour gagner en effectivité. L’idée était de sortir d’une dynamique technocratique pour générer un processus planétaire plus humain et plus solidaire.

Propos recueillis par Olivier Grobet

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