La 71e édition du festival cinématographique de Locarno associée à l’ONU

L’art ibéro américain sur le grand écran du principal festival helvétique 

Une vingtaine de films ibéro américains seront projetés du 1er au 11 août 2018, lors du Festival de Locarno, le plus important de Suisse et l’un des plus réputés sur le plan européen. Lors de la Compétition internationale, de la section Cinéastes du présent, de la Semaine de la critique et sur la Plaza Grande, sept productions latino-américaines participeront au concours. Alors que des œuvres espagnoles et portugaises – et également un film sud-américain – seront projetées dans les sections Signs of Live et Pardi de domani (Léopards de demain) durant cette 71e édition.

Une édition conçue « sous le signe de l’humanisme », explique Carlo Chatrian, le directeur artistique, qui après le rendez-vous dans la ville de Locarno assumera immédiatement la direction de la Berlinale et de ses ours d’or.

« L’homme au centre de la programmation », poursuit Chatrian. Et bien que cela paraisse évident, c’est une décision fondamentale, « vu qu’aujourd’hui plus que    jamais les personnes ont peur de regarder leur prochain en face ». Tacitement, il assume la critique d’un monde où prévaut la peur individualiste de l’autre et de la différence.

La décision du Festival de Locarno, consistant à célébrer cette année, avec les Nations Unies, le 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits humains peut être comprise comme antidote expérimental contre ces peurs. « Penser que le Festival a le même âge que cette Charte, si simple et essentiel, nous stimule et nous remplit d’orgueil », relève Chatrian.

Un film de 14 heures dans la compétition 

La Flor, du réalisateur argentin Mariano Llinás, d’une durée de 815 minutes, constitue l’une des « raretés » de la sélection officielle de cette 71e éditions. « C’est un film passionnant », explique Chatrian à ce correspondant.

Et de rappeler que l’objectif d’un festival « consiste d’une part à aider les films à exister dans les cinémas et d’autre part, comme Locarno se comprend, à montrer qu’il existe diverses formes pour réaliser un film ». La Flor ouvre la porte aux cinéastes pour se lancer et innover. « Cela ne signifie pas que tous les réalisateurs doivent faire des films de 14 heures, mais ils peuvent travailler avec des épisodes et des durées différentes. Ce sera à la presse et à la critique, une fois le festival terminé, de nous dire si nous avons eu raison ou si nous nous sommes trompés avec ce choix… ».

Un grand défi « logistique » : comment projeter un film de 14 heures ? avons-nous demandé au responsable artistique de Locarno. « C’est impossible de tout montrer, d’une seule fois, dans une séance unique », explique ce dernier. « Nous allons le montrer en sept parties, selon le choix du cinéaste. Chacune d’entre elles sera projetée le matin, dans une même salle, durant une semaine. La seconde manière de projection – dans une autre salle différente – se déroulera en trois parties, à trois moments différents ».

Intégrer dans l’agenda ces 14 heures de projets représentera un défi énorme, spécialement pour le jury international et pour la presse spécialisée. « Tout grand festival présente ces provocations… Le choix d’une grande offre de films qui coïncide dans le temps et qui oblige à choisir », estime Chatrian.

L’Amérique latine fortement présente 

La jeune réalisatrice chilienne Dominga Sotomayor, dont deux films antérieurs avaient déjà été récompensés à Rotterdam et dans d’autres festivals, arrive à Locarno avec son nouveau film Tarde para morir joven – une co-production chilienne-brésilienne et qatarie. Avec La Flor, ce film représentera l’Amérique dans la compétition internationale pour le « Léopard d’Or », trophée majeur décerné à Locarno.

Sur la Piazza Grande, véritable cœur et symbole du Festival de Locarno – pouvant contenir 8.000 spectateurs, avec un écran géant de plus de 300 m2 -, le film colombien Pájaros de verano, de Cristina Gallego et Ciro Guerra sera le seul film latino-américain parmi les 17 films présents dans les onze nuit du festival. Il cherchera non seulement un appui international, mais aussi à conquérir les sympathies populaires en aspirant à obtenir le toujours significatif « Prix du public ».

Dans Cinéastes du présent, Familia sumergida, de la jeune directrice argentine María Alché ; la coproduction mexicano-canadienne Fausto, d’Andrea Bussmann ; et Temporada, du réalisateur brésilien André Novais Oliveira chercheront à se projeter dans la gloire. Ils concourent pour quatre prix différents représentant un total de 90.000 francs suisses (équivalent à une valeur identique en dollars étatsuniens).

Du Brésil également, mais dans la section Signs of Live, l’expérimenté directeur Júlio Bressane arrive avec la plus récente de ses plus de 50 œuvres, Seduçao da Carne.

La jeune cinématographie ibéro américaine 

Accompagnée dans la même session par Como Fernando Pessoa salvou Portugal, du réalisateur nord-américain Eugene Green, une coproduction franco-belge et portugaise ; on trouve La Casa de Julio Iglesias, de l’Espagnole Natalia Marín et Sobre tudo sobre nada, film portugais de Dídio Pestana.

La présence ibéroaméricaine à cette 71e édition du Festival de Locarno comprend Trote, de l’Espagnole Xacio Baño, à Cinéastes du présent, et est complétée par diverses productions dans la session Léopards de demain, qui projette des cours- et des longs métrages de jeunes auteur-e-s indépendant-e-s et d’étudiant-e-s d’écoles de cinéma. Seront présentés : 3 anos depois, du Portugais Marco Amaral ; la coproduction colombienne et franco-étatsunienne El laberinto, de Laura Huertas Millán ; Grbavica, du photographe catalan Manel Raga Raga ; La máxima longitud de un puente, coproduction colombienne et argentine de Simón Vélez ; le Vénézuélien Oscar Vincentelli avec Violeta+Guillermo ; et la coproduction hispano-étatsunienne Words Planets, de la jeune réalisatrice basque Laida Lertxundi. En outre, la directrice espagnole Elena López Riera, avec Los que desean, participe à la sélection des cinémas suisses de cette même session, vu la relation professionnelle de longue date de cette directrice avec le pays hôte du festival.

Hors concours, Locarno projettera aussi le film espagnol Mudar la piel, de Ana Schultz et Cristóbal Fernández. Alors que la Semaine de la critique – prestigieuse session programmée par des journalistes et des critiques de cinéma – a choisi pour l’édition 2018 La huella de Tara, de la directrice argentine Georgina Barreiro.

Sergio Ferrari

*Traduction de l’espagnol : Hans-Peter Renk

 

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