L’équilibre complexe de trois forums

Le roi est mort, vive le roi. Et alors que s’achève la septième édition du Forum social mondial (FSM), vive l’Afrique!
 
Après cinq jours de débats, d’échanges interculturels et de mobilisations, un premier regard rétrospectif s’impose. Et si un élément s’est nettement détaché de la rencontre altermondialiste, ce fut la coexistence de plusieurs forums en un.
Le premier, dans l’enceinte du stade international de Kasarani, immense arène de 100 000 places intelligemment adaptée pour recevoir les 50 000 participants, fut le forum des débats intenses et de la réflexion approfondie. L’essence théorique d’une rencontre qui plût par sa richesse thématique. Etaient présents non seulement les grands thèmes traditionnels du FSM, mais aussi la dimension spécifiquement africaine. On le vît par les multiples débats sur les relations Europe-Afrique, la dette, la fiscalité internationale, la terre, la pauvreté et le sida. Sans oublier l’avenir du FSM. Absence préoccupante: les grands défis écologiques n’ont été que peu abordés, malgré la désertification croissante du continent africain.
 
Hors des gradins, dans les couloirs du stade, eut lieu le deuxième forum. Celui de la musique, de la culture, de la promotion des produits locaux, mais aussi celui des manifestations internes, du cri et de la passion. Un mélange de marché et de théâtre permanent. Il apporta couleur, chaleur et vie. Après Porto Alegre et Mumbai, une autre façon de comprendre, de vivre et d’extérioriser la politique s’est emparée du FSM.
 
Le troisième forum fut celui des immenses tentes, situées hors de l’enceinte sportive et officielle. A de rares exceptions près – tel que l’espace Droits humains – il paya le prix du gigantisme. Un éléphant disproportionné. Les enceintes prévues pour un millier de personnes n’en contenaient qu’une centaine. Ce secteur, paradoxalement, était celui des activités proposées par le comité d’organisation, les seules dont les programmes mentionnaient le nom des participants.
L’échec est d’autant plus cuisant que ces tentes constituaient le seul lieu totalement ouvert au public, sans droit d’entrée ni accréditation. L’intersection géographique entre le Forum social et la société civile de Nairobi. Au final, la population kenyane aura été bien discrète. Non seulement lors de la marche d’ouverture mais aussi dans la vie quotidienne du FSM.
 
Le rideau tombe sur cette nouvelle édition. L’Afrique a vécu son premier forum.
Le défi, désormais, est clair: que le troisième forum – celui de dehors – devienne rapidement le principal. Que Nairobi se réveille. Que les mouvements sociaux africains se renforcent.I
 
SERGIO FERRARI, NAIROBI

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