Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 55 – Genève, le 12 novembre 2010

Le deuxième tour des élections : Dilma l’emporte aussi en Amazonie / Les droits indigènes et le nouveau gouvernement / Lula signe le décret de création du Secrétariat Spécial de la Santé Indigène / La SECOYA reçoit un renfort bienvenu.

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Le deuxième tour des élections : Dilma l’emporte aussi en Amazonie
Les citoyens brésiliens ont choisi. Ils ont élu Dilma Rousseff, la dauphine le Lula et candidate du Parti des Travailleurs – PT, à la présidence de la république. Elle l’emporte avec plus de 56% des 99,3 millions de votes valides. Elle arrive en tête dans quinze États de l’Union et dans le District fédéral. José Serra, du Parti Social-Démocrate – PSDB, a été crédité de 44% des votes, arrive en tête dans onze Etats. Il a aussi été le favori des 80’000 électeurs brésiliens de l’étranger, auprès desquels il a recueilli 59% des suffrages.
Pour la première fois de son histoire, le Brésil sera dirigé par une femme. Il est un peu tôt pour savoir sur lequel des deux candidats restés en lice, les près de 20 millions d’électeurs de Marina Silva du premier tour ont reporté leur voix. Entre le premier et le deuxième tour, Dilma a vu le nombre de ses électeurs passer de 47,6 à 55,7 millions, soit une progression de l’ordre de 17%. Et Serra de 33,1 à 43,7 millions de suffrages, soit une augmentation de près de 32%. Ces données tendent à montrer que ce dernier a davantage séduit l’électorat de Marina Silva du Parti Vert. Celui-ci avait décidé de rester « indépendant » pour le deuxième tour. Comme au premier tour, Dilma l’a emporté aussi en Amazonie légale* avec 62% des 11,4 millions des votes valides dénombrés dans cette région. Elle arrive en tête dans cinq États. En pourcentage, elle fait même deux de ses meilleurs scores nationaux dans les États de l’Amazonas et du Maranhão où elle a obtenu respectivement 80% et 79% des voix. Dans cette partie du Brésil, Serra recueille 38% des voix. Il est le premier classé dans quatre États. En pourcentage toujours, il fait ses meilleurs résultats nationaux dans les deux États d’Acre et Roraima avec 69% et 66,5% des suffrages.
Ce clivage politique, très marqué au sein de l’Amazonie légale, n’illustre qu’en partie les divergences relatives au type développement économique de la région voulu par les deux coalitions de partis en lutte pour la présidence. On sait l’opposition des organisations indigènes à certains programmes du gouvernement de Lula qui vont vraisemblablement être maintenus. Voir la note ci-après.
Pour en savoir plus (en portugais), les résultats des élections : http://apuracao.ebc.com.br/ et
* L’Amazonie légale est composée de huit États : Acre, Amapá, Amazonas, Mato Grosso, Pará, Rondônia, Roraima et d’une partie du Maranhão. Elle a une superficie de 5,2 millions de km2 qui correspond à environ 61% du territoire brésilien. Elle est habitée par environ 12,5% de la population brésilienne. Dans cette statistique électorale, l’État du Maranhão a été pris dans sa globalité.
Les droits indigènes et le nouveau gouvernement
Le 29 octobre, à la veille du deuxième tour de l’élection présidentielle, l’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB, qui regroupe les principales organisations indigènes de tout le Brésil, a rendu publique une lettre ouverte, adressée aux deux présidentiables Dilma Rousseff et José Serra. Ce document comporte une dizaine de points qui en font l’essentiel d’une politique indigéniste que les auteurs voudraient voir être mise en œuvre par le prochain gouvernement. Plusieurs thèmes sont d’ordre institutionnel : l’approbation, par le Congrès, du « Statut des Peuples Indigènes » et du projet de loi relatif à la création du « Conseil National de Politique Indigéniste; la mise en œuvre du Secrétariat Spécial de Santé Indigène – SESAI, et l’autonomie des Districts Sanitaires Spéciaux Indigènes – DESEI; l’adaptation de la Fondation Nationale de l’Indien – FUNAI, au nouveau contexte de la politique indigéniste et la participation des peuples indigènes dans les discussions des mesures ou politiques publiques qui les affectent. D’autres points concernent l’application de droits déjà reconnus : la démarcation et la protection des terres indigènes; la garantie de l’accès de tous les indigènes à une éducation de qualité conforme aux besoins de chaque peuple et la fin de la criminalisation des leaders indigènes. Les organisations demandent au gouvernement de renoncer aux ouvrages qui ont un impact direct ou indirect sur les Terres indigènes, comme la transposition du rio São Francisco ou la construction du complexe hydroélectrique de Belo Monte… « ceci pour éviter des dégâts irréparables à Mère Nature et à la survie physique, culturelle et spirituelle des peuples qui l’habitent ». Ce texte a été élaboré à partir des résolutions adoptées lors du VIIe campement « Terre Libre » qui a eu lieu au mois d’août à Campo Grande dans le Mato Grosso do Sul*
*Voir AYA Info No 53
Lula signe le décret de création du Secrétariat Spécial de la Santé Indigène
Le 19 octobre, le Président de la république a signé le décret qui place le service de santé indigène sous la responsabilité directe du Ministère de la santé. Ce service était jusque-là confié à la Fondation Nationale de la Santé – FUNASA. Le décret crée ainsi le Secrétariat Spécial de la Santé Indigène – SESAI, demandé de longue date par les organisations indigènes qui se plaignaient des dysfonctionnements de la FUNASA. Les deux organes ont un délai de six mois pour effectuer la transition. Il appartient à la FUNASA de donner tout l’appui nécessaire pour que la transition se fasse sans altérer le service de santé dans les communautés indigènes. Le nouveau SESAI devra coordonner la mise en œuvre de la politique nationale de santé des Peuples indigènes par le moyen d’une gestion démocratique et participative. Le Secrétariat comportera deux départements, l’un chargé de la gestion et l’autre chargé du service de santé proprement dit. Les deux départements seront au service des trente-quatre Districts Sanitaires Spéciaux Indigènes – DSEI, répartis dans tout le Brésil. Reste un énorme travail à réaliser pour rendre le nouveau SESAI opérationnel et lui donner la capacité d’apporter aux communautés indigènes le service de santé, de qualité, auquel elles ont droit. Le Secrétaire du SESAI, Antonio Alves, a déjà pris contact, à Brasilia, avec l’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB. Il s’est déplacé à Boa Vista, la capitale de l’État de Roraima, pour rencontrer les responsables du DSEI Yanomami. Il a également participé à la IVe Assemblée Générale de Hutukara Association Yanomami – HAY qui a eu lieu du 1er au 7 novembre dans la communauté de Toototobi, dans la Terre Indigène Yanomami. AYA Info reviendra sur cette assemblée dans un prochain bulletin.
Voir « AYA Info » Nos 49 et 52
Pour en savoir plus (en portugais) :
– L’écho au sein des organisations indigènes : http://blogapib.blogspot.com/2010/10/presidente-lula-assina-decretos-que.html /
– Des premiers reflets de l’AG de l’HAY : http://www.hutukara.org/
La SECOYA reçoit un renfort bienvenu
Sylvie Petter, infirmière de son état, a quitté son Vully* natal à la fin octobre pour rejoindre l’équipe du « Service et Coopération avec le peuple Yanomami » – SECOYA, dont le siège est à Manaus. Elle y a intégré le programme « Santé ». Sylvie est volontaire de l’ONG « E-Changer » dont le siège est à Fribourg (Suisse). Le 11 septembre, à Lugnorre, son village d’origine, elle a présenté son futur travail à sa famille et à ses amis qui constituent son « Groupe de soutien ». Quatre membres d’AYA avaient fait le déplacement. Parmi eux, le docteur Pedro Albajar Viñas qui est aussi membre de la SECOYA. Sylvie a déjà voyagé et séjourné en Amérique latine, en Equateur et au Brésil. Sur son blog, elle raconte son arrivée à Manaus le 29 octobre. Elle a passé le week-end de la Toussaint à Rio Preto da Eva, une localité située à 80 km de Manaus où Silvio Cavuscens, le coordinateur de la SECOYA reçoit ses visiteurs quand il veut leur donner un aperçu de la forêt amazonienne.
* Le Vully est une région de Suisse située entre les lacs de Neuchâtel et de Morat.
Pour en savoir plus – en français – le blog de Sylvie : http://sylvie-petter.blogspot.com/p/le-projet.html > archives du blog et – en portugais – le site de SECOYA et son programme de santé : http://www.secoya.org.br/ > Saúde
Bernard Comoli
AYA – Appui aux indiens Yanomami d’Amazonie
15 Chemin de la Vie-Longe – CH – 1213 Onex /Genève – CCP 17-5506-2

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