Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 60 – Genève, le 28 avril 2011

Davi Kopenawa avec chamans et ministre / Les conflits dans la campagne brésilienne / Premier « Avril indigène » de l’ère Dilma / La COIAB s’adresse au ministre de la justice.

« AYA Info » peut être consulté sur les sites Internet :

http://www.terrabrasilis.ch > Aya Info,

http://www.humanitaire.ws > Rubriques > AYA

http://www.okamag.fr/ > Nouvelles de nos frères d’ailleurs

http://mci.fgc.ch/mci/ > actualités

Davi Kopenawa avec chamans et ministre

C’est une première chez les Yanomami : du 22 au 24 mars, Davi Kopenawa, le président de Hutukara Association Yanomami – HAY, et lui-même chaman, a réuni une quarantaine de chamans de la Terre Indigène Yanomami – TI Y, dans sa communauté de Watoriki. Cette réunion avait plusieurs objectifs : Valoriser les traditions chez les jeunes Yanomami très attirés par le mode de vie des Blancs. Réaffirmer la tradition chamanique en réponse à l’offensive croissante des missionnaires évangélistes présents dans la TI Y. Susciter une réflexion cosmologique des chamans sur la crise écologique mondiale et la nécessaire mobilisation pour la protection de l’Amazonie contre le développement prédateur des Blancs.

Quelques jours plus tard, le 30 mars, Davi était à Brasilia, avec Levi Yanomami, accompagnés tous deux d’Ana Paula Souto Maior, l’avocate de l’Institut Socio-environnemental – ISA. Ils avaient une rencontre avec le ministre de la santé, Alexandre Padilha et Antônio Alves, le responsable du Secrétariat Spécial de la Santé Indigène – SESAI. Les deux Yanomami sont allés demander l’autonomie financière et administrative du District Sanitaire Spécial Indigène Yanomami – DSEI-Y, l’organisme chargé du service de santé dans les communautés. Davi a souligné l’importance de désigner, à la tête du DSEI-Y, un responsable qualifié, bon connaisseur de la culture Yanomami et jouissant de la confiance des indigènes. Il a demandé que ces critères l’emportent sur des choix politiques qui, dans un passé récent, ont été à l’origine des détournements de fonds, alors que les déficiences du service de santé avaient de graves conséquences sur l’état de santé de la population Yanomami. Antônio Alves a confirmé que le DSEI-Y aura bien une autonomie financière et administrative et que le contrôle social par les usagers – les indigènes – va continuer. Pour un meilleur fonctionnement du District, le SESAI devrait engager du personnel. Or, le ministre de la planification n’autorise pas l’engagement des nouveaux fonctionnaires indispensables pour la bonne gestion du service de santé… Le 19 avril, le ministre a annoncé que le délai, pour le transfert du service de santé indigène de la FUNASA* au SESAI, primitivement prévu pour ce mois d’avril, était repoussé au 31 décembre 2011.

* Voir « AYA Info » No 55 > la « brève » qui annonce la création du SESAI par Lula

Pour en savoir plus (en portugais) :

• Le site de ISA sur les deux événements : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=3281 et http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=3287

Les conflits dans la campagne brésilienne

Le 15 avril, la Commission Pastorale de la Terre – CPT, un organe de la Conférence Nationale des Evêques du Brésil, a publié son rapport 2010* sur les conflits dans la campagne brésilienne. Le rapport aborde quatre types de conflits : Les conflits pour la terre, les conflits du travail, ceux pour l’eau et ceux qui concernent divers domaines. Au total, en 2010, il y a eu 1’186 conflits, impliquant 559’400 personnes. La CPT a dénombré 34 assassinats. Les conflits de la terre sont les plus nombreux : 853, impliquant 351’935 personnes, avec 30 assassinats. Mais, pour la troisième année consécutive, ce chiffre est en dessous de la moyenne (1’010), des dix dernières années. Il y en a eu 452 (53%), dans les neuf États de l’Amazonie légale. Au deuxième rang, les conflits du travail (travail esclave, surexploitation de la main d’œuvre et non respect de la législation). Ils sont au nombre de 242, impliquant 5’806 personnes, avec deux assassinats. Il y a eu 87 conflits pour l’eau, impliquant 197’210 personnes, et deux assassinats. Il y en avait eu 45 en 2009 et 46 en 2008. En 2007, il y en avait déjà eu 87, mais ils avaient touché « seulement » 163’735 personnes. En 2010, l’Amazonie légale a connu 28 de ces conflits, soit 32% de ceux comptés dans le pays. Le plus connu est celui relatif au barrage de Belo Monte, sur le rio Xingu, dans l’État du Pará. Dans le rapport, l’un des commentateurs souligne que « La politique agressive de privatisation mercantile des eaux, promue par les transnationales du secteur, relayée par les organismes internationaux comme le FMI et la Banque Mondiale, soutenue par les gouvernements nationaux, ne peuvent, évidemment, qu’engendrer une augmentation de la tension ». À propos des peuples indigènes : « Comme ces dernières années, la question indigène est loin d’être résolue… » « Les demandes des populations indigènes impliquent la mise en oeuvre des accords ou l’amélioration des politiques publiques de santé, d’éducation, d’infrastructures, de législation du travail, de démarcation des terres et les mobilisations pour la défense de l’eau et de l’environnement qui, en général, sont engendrés par l’exploitation minière ou la construction de barrages avec la perte de territoires ».

Cette année marque le quinzième anniversaire du massacre de Eldorado dos Carajás (État du Pará), survenu le 17 avril 1996 qui a coûté la vie à 19 paysans sans terre. Ils manifestaient pour l’attribution de terres. Le 17 avril est devenu la « Journée mondiale des luttes paysannes« .

Pour en savoir plus (en portugais) :

• Le site de la CPT : http://www.cptnacional.org.br > O relatório Conflitos no Campo Brasil 2010

* Voir « AYA Info » No 50 Une « brève » est consacrée au rapport 2009.

Premier « Avril indigène » de l’ère Dilma

 

Au Brésil, le 19 avril est le « Jour de l’Indien ». Des manifestations ont lieu dans le pays et pas seulement le jour même, mais au cours du mois d’avril. L’événement le plus marquant de ces célébrations est certainement la réunion du Forum National des Leaders Indigènes – FNLI, qui a eu lieu à Brasilia du 17 au 20 avril à l’initiative de l’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB. Les représentants des principales organisations indigènes ont rédigé une « Lettre ouverte » adressée à la présidente Dilma Rousseff, et remise au Ministre de la Justice, José Eduardo Cardozo, lors d’une audience accordée le 19 avril. Ce document reprend les principales revendications des peuples indigènes : L’adoption du Statut des Peuples Indigènes et la création d’un Conseil National de Politique Indigéniste. La démarcation, la protection des terres indigènes. La participation des organisations indigènes dans le processus d’élaboration du Plan Pluriannuel (qui fixe les axes budgétaires) pour 2011-2014. L’attribution de ressources financières suffisantes au Secrétariat Spécial de Santé Indigène – SESAI, qui doit rapidement être en mesure d’assumer ses responsabilités. La participation des organisations indigènes dans le processus de restructuration de la Fondation Nationale de l’Indien – FUNAI. L’application de la Convention 169 de l’OIT et de la Constitution fédérale en matière de consultation sur les sujets qui affectent les peuples indigènes. Que le ministère de l’éducation mette en oeuvre les territoires « ethno-éducationnels » et les résolutions de la Conférence Nationale de l’Education Indigène de 2009. Que le ministère de la culture assure la participation des organisations indigènes dans la formulation des politiques relatives à la diversité culturelle. Les signataires demandent la participation des peuples et organisations indigènes dans un programme de protection et de sécurité dans les zones frontalières menacées par des pratiques illicites qui portent préjudice principalement aux jeunes et aux enfants. Que le gouvernement garantisse l’accès des peuples et communautés indigènes aux politiques de sécurité alimentaire. C’est là tout un programme de gouvernement*. Le 19 avril également, un « Front parlementaire d’appui aux peuples indigènes » a été créé à la Chambre des Députés. Il est présidé par Ságuas Moraeis, député du Parti des Travailleurs de l’État du Mato Grosso. Le même jour, la présidente de la république a signé les décrets d’homologation de trois Terres Indigènes situées en Amazonie.

*Voir « AYA Info » No 55 (12/11/2010) > Les droits indigènes dans le nouveau gouvernement

Pour en savoir plus (en portugais) :

• Le site de l’APIB : http://blogapib.blogspot.com/2011/04/abril-indigena-movimento-indigena.html /

• Le site du ministère de la Justice : http://portal.mj.gov.br/data/Pages/MJ2498B870ITEMIDBC75A9BF22C94B0D873A1AB48BE8F9BBPTBRNN.htm

La COIAB s’adresse au ministre de la justice

Au terme de la réunion de son Conseil délibératif, réuni à la fin du mois de mars à Manaus, la Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne – COIAB, a adressé une lettre au ministre de la justice, José Eduardo Cardozo. Le Conseil a fait un état des lieux de la situation vécue par les peuples indigènes de cette région du Brésil : L’absence de consultation de la part du gouvernement sur les affaires les concernant. La complexité des jeux et intérêts économiques et politiques. La restructuration de la Fondation Nationale de l’Indien – FUNAI, qui laisse le champ libre aux invasions des Terres indigènes par les pêcheurs, chasseurs et exploitants forestiers. La mise en danger des groupes indigènes isolés. La criminalisation des leaders indigènes qui luttent pour le respect des droits territoriaux de leurs peuples et communautés. Pour changer cette triste réalité, la COIAB demande au ministre « qu’il y ait un engagement majeur des personnes et organes impliqués dans l’accompagnement et la mise en œuvre des politiques publiques destinées à nos communautés. »

Pour en savoir plus, le site de la COIAB (en portugais) : http://www.coiab.com.br/coiab.php?dest=show&back=noticia&id=708&tipo=N&pagina=1

 

Bernard Comoli (avec l’aide de Bruce Albert)

 

AYA – Appui aux indiens Yanomami d’Amazonie

15 Chemin de la Vie-Longe – CH – 1213 Onex /Genève – CCP 17-5506-2

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