Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 85 – Genève, le 21 août 2013

La SECOYA poursuit la formation d\’agents de santé et de professeurs Yanomami / En 2012, la violence contre les peuples indigènes a augmenté / JMJ: des jeunes indigènes du Tocantins rencontrent le pape François / Barrages sur le rio Tapajós : les études reprennent sous la protection des forces de sécurité.

« AYA Info » est en ligne sur les sites Internet :
http://www.humanitaire.ws > Rubriques > AYA…
La SECOYA poursuit la formation d\’agents de santé et de professeurs Yanomami
Le Service et Coopération avec le Peuple Yanomami – SECOYA a réalisé la onzième étape (qui en compte douze) du cours de formation de professeurs Yanomami. Ce cours vise la certification des enseignants par le Ministère de l\’Éducation. Il a eu lieu du 10 juin au 12 juillet à Rio Preto da Eva, une municipalité située à près de 80 km de Manaus. Dix-neuf professeurs et deux leaders traditionnels originaires des communautés indigènes des rios Marauiá et Demini, localisés dans les communes de Santa Isabel do rio Negro et Barcelos. La pratique et le rôle pédagogique de l\’éducateur Yanomami étaient les thèmes centraux de cette étape. Les enseignants étaient du Secrétariat de l\’Éducation et de l\’Université de l\’État d\’Amazonas. Ce programme d\’éducation différenciée de la Secoya est en grande partie soutenu par Terre des Hommes Suisse/Genève. Des représentants de l\’ONG ont eu l\’occasion d\’assister à une partie du cours.
Du 13 au 22 juin, à Bicho-Açu, une communauté du rio Marauiá, la SECOYA a organisé le deuxième cours de formation d\’Agents indigènes (Yanomami) de Santé. Ont suivi le cours, dix-neuf agents de santé, six leaders des communautés de Kona, Pohoroá, Komixiwe et Bicho-Açu et un chaman de Ixima qui traité de la médecine traditionnelle. Le cours a été animé par Sylvie Petter et Judith Schneider, toutes deux volontaires de E-Changer, ONG suisse dont le siège est à Fribourg. Ce programme a pour objet de développer la prévention des maladies, la valorisation de la médecine traditionnelle et aussi le rôle des représentants indigènes dans les instances publiques liées à la santé. Le cours a particulièrement traité de la dénutrition qui affecte principalement les enfants jusqu\’à 5 ans et les femmes. Il y a eu tout un débat sur l\’importance de maintenir l\’allaitement maternel alors que se développe l\’usage du lait en poudre. Ce programme reçoit l\’appui de la Ville de Genève par l\’intermédiaire de AYA et par Caldes Solidària, une ONG catalane.
Voir AYA Info No 73 et No 80
En 2012, la violence contre les peuples indigènes a augmenté
En 2012, par rapport à 2011, dans les trois catégories de violences traitées par le document publié le 27 juin par le Conseil Indigéniste Missionnaire* – CIMI, il y a eu une augmentation du nombre de cas et de victimes. Les cas de « violence contre le patrimoine » passent de 99 à 125. La « violence par négligence des pouvoirs publics » touchent 106\’801 personnes contre 61\’801 en 2011. C\’est dans la catégorie de « violence contre la personne » qui comprend les menaces de mort, les homicides, tentatives d\’assassinats, racisme, lésions corporelles et violence sexuelle que l\’augmentation est la plus marquée : 1\’276 victimes (378 en 2011). Il y a eu 60 assassinats (51 en 2011). Ces assassinats ont des causes diverses, quelques-uns pour des conflits de la terre, d\’autres pour des disputes interpersonnelles où la consommation ou l\’abus d\’alcool a été un élément facilitateur. En 2012, 37 d\’entre eux l\’ont été dans l\’État du Mato Grosso do Sul. Une situation malheureusement habituelle. En effet, depuis 2003, soit ces dix dernières années, sur les 563 assassinats dénombrés dans le pays, 317 (55%) l\’ont été dans cet État. À parcourir les différents rapports du CIMI, l\’évolution est inquiétante : sous la présidence de Fernando Henrique Cardoso, de 1995 à 2002, le Cimi a compté un total de 165 assassinats, soit une moyenne annuelle de l\’ordre de 20,6. Sous la présidence de Lula, de 2003 à 2010, il en a dénombré 452, soit une moyenne annuelle de 56,5. Pour les deux premières années de la présidence de Dilma Rousseff, il y en a eu 111, soit une moyenne annuelle de 55,5. Pour les auteurs du rapport**, cette violence trouve son origine dans plusieurs causes : 1.- Les conflits de la terre, accrus par l\’indifférence du gouvernement vis-à-vis de ces conflits et sa position qui consiste à ne pas démarquer les terres indigènes, contribuant ainsi à l\’augmentation des invasions et autres formes de violation des droits humains. 2.- Au confinement de peuples indigènes dans de petites réserves – notamment dans le Mato Grosso do Sul – qui sont de véritables camps de concentration. 3.- Aux campements sur les bords des routes où des dizaines de communautés indigènes sont abandonnées et exposées à d\’innombrables dangers. 4.- La dégradation environnementale des Terres démarquées engendrée par l\’exploitation du bois, des minerais, de l\’énergie électrique. 5.- À la politique de développement du gouvernement qui transforme les droits indigènes en « obstacle au développement économique ». 6.- À l\’absence d\’une politique indigéniste articulée avec les autres politiques [de l\’État], ce qui fragilise les actions et services destinés aux communautés indigènes : santé, éducation, etc. On retrouve là, les thèmes qui ont fait descendre de nombreux Brésiliens dans les rues ces dernières semaines.
* Le CIMI est l\’organisme de la Conférence nationale des évêques du Brésil – CNBB chargé des questions indigènes. / ** Lucia Helena Rangel, anthropologue à l\’Université Pontificale Catholique – PUC de São Paulo et Roberto Antonio Liegbott, missionnaire laïc rattaché au CIMI Régional Sud.
Voir « AYA Info » No 74 pour le précédent rapport.
JMJ: des jeunes indigènes du Tocantins rencontrent le pape François
Présent au Brésil pour les Journées Mondiales de la Jeunesse – JMJ, le samedi 27 juillet, le pape François rencontrait, au Théâtre municipal de Rio de Janeiro, des membres de la classe politique, des diplomates, des personnalités du monde culturel, des grandes communautés religieuses et des représentants de la société civile. Parmi ces derniers, trois jeunes indigènes du Tocantins. L\’un d\’entre eux, Adriano Karajá, a remis une lettre au pape lui demandant, au nom des peuples indigènes de tout le pays, d\’intervenir auprès du gouvernement brésilien pour que celui-ci arrête toutes les attaques à l\’encontre des peuples indigènes… « Nos territoires sont constamment menacés par les grands projets, routes, usines hydroélectriques lignes ferroviaires. Ces projets sont des projets de mort pour notre Mère Terre… Nous demandons à l\’ami et défenseur des pauvres qu\’il demande au gouvernement brésilien qu\’il arrête avec tous ces projets génocidaires… » Et de citer les différents projets de loi qui portent atteinte aux droits reconnus par la Constitution de 1988 et la Convention 169 de l\’Organisation Internationale du Travail. Dans son discours à ceux qui ont une responsabilité dans une nation, le pape a souligné comment « Il est important de valoriser l\’originalité dynamique qui caractérise la culture brésilienne avec son extraordinaire capacité à intégrer des éléments divers« . Parlant de la responsabilité sociale : « Le futur exige de nous une vision humaniste de l\’économie et une politique qui réalise chaque fois plus une meilleure participation des personnes évitant les élitismes et éradiquant la pauvreté ». François est revenu à plusieurs reprises sur la nécessité du dialogue. Il en a quasiment fait la conclusion de son message : « Je tiens comme fondamental pour affronter le présent : le dialogue constructif. Entre indifférence et la protestation violente, il y a une option toujours possible : le dialogue… » « Quand des leaders me demandent un conseil, ma réponse est toujours la même : dialogue, dialogue, dialogue… » Le pape François a manifestement contextualisé son discours.
Barrages sur le rio Tapajós : les études reprennent sous la protection des forces de sécurité
Le « Goupe d\’étude Tapajós » – environ 200 personnes – chargé des enquêtes de viabilité technique et environnementale des projets d\’ouvrages hydroélectriques de São Luiz do Tapajós et Jatobá est à pied d\’œuvre depuis le 12 août. Il est protégé par un important service d\’ordre arrivé à Jacareacanga (Pará). Ces études avaient été suspendues le 23 juin* en échange de la libération de trois chercheurs retenus par les Munduruku qui ne veulent pas de la construction de ces ouvrages. Le groupe d\’études est coordonné par l\’entreprise Electrobras. Il doit rassembler les données à soumettre à l\’Institut Brésilien de l\’Environnement – IBAMA chargé de délivrer l\’autorisation de construction des ouvrages. Selon Electrobras, une première partie des études doit être réalisée entre le 12 août et le 10 septembre, et une deuxième partie entre le 15 septembre et le 20 novembre sur 22 zones différentes. Aucune de celles-ci – dit l\’entreprise – ne se situe en Terre indigène. Selon elle, les études doivent permettre la consultation des peuples indigènes conformément aux dispositions de la Constitution et de la Convention 169 de l\’Organisation Internationale du Travail – OIT.
Pour les leaders Munduruku, « le gouvernement a rompu l\’accord du 23 juin et veut imposer le projet contre notre volonté ». Un avis partagé par le Conseil Indigéniste Missionnaire – CIMI pour lequel, ce jour-là, le gouvernement fédéral avait renvoyé les études après l\’adoption de la réglementation du droit à la consultation préalable prévu par la Convention 169. Le Mouvement des Atteints par les Barrages – MAB, est aussi d\’avis que la consultation doit être réalisée avant les études. Dans un manifeste, le peuple Kawaiwete (du Mato Grosso) soutient les Munduruku : « Nous réaffirmons notre appui à nos parents dans leur lutte contre l\’implantation des ouvrages hydroélectriques qui affectent leurs communautés et nous désapprouvons les actions du gouvernement fédéral visant à faire pression sur [ce] peuple pour qu\’il accepte ces projets ».
* Voir AYA Info No 84.
Bernard Comoli
Important : L\’activation des liens hypertextes renvoie aux sources utilisées pour la rédaction de ce bulletin. Elles sont souvent en portugais, sauf quand il s\’agit d\’anciens « AYA Info ».
PS : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et parfois illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l\’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
AYA – Appui aux indiens Yanomami d\’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2

Laisser un commentaire