Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 97 – Genève, le 24 octobre 2014

À Genève, plus de 4\’500 jeunes et enfants ont marché en faveur des enfants Yanomami* / Carlito en visite à l\’OMS / Un nouveau président à la tête de la FUNAI / Élections brésiliennes : le deuxième tour ce 26 octobre / La 1ère Conférence mondiale sur les Peuples autochtones.

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À Genève, plus de 4\’500 jeunes et enfants ont marché en faveur des enfants Yanomami*
Bénéficiant d\’une météo favorable, plus de 4\’500 participants, principalement des enfants et des jeunes de 7 à 12 ans, étaient à ce rendez-vous solidaire qu\’est la Marche de l\’espoir organisée par Terre des Hommes Suisse. La manifestation s\’est déroulée à Genève, le 12 octobre, au bord du lac Léman. La foule des parents, des enfants et des jeunes a passé à proximité du Palais Wilson, le siège du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l\’homme. Tout un symbole !
Les participants avaient recherché dans leur entourage des sponsors qui s\’engageaient à verser une contribution pour chaque kilomètre parcouru. En moyenne, les jeunes ont marché une dizaine de kilomètres, certains effectuant même entre 30 et 40 kilomètres. Les promesses de dons laissent espérer un bénéfice de 400\’000 francs suisses. Cette année, la somme récoltée doit notamment permettre de soutenir un projet pour les enfants du peuple Yanomami en Amazonie brésilienne : accès à une éducation différenciée, la défense de leurs droits et la préservation de leur mode de vie et de leur environnement.
Dans les semaines précédant l\’événement une équipe de Terre des Hommes Suisse a sensibilisé 28\’000 enfants des classes genevoises et de France voisine à la réalité des enfants en Amazonie. Présents à Genève la semaine avant la Marche, Carlito Ixima** et Silvio Cavuscens, respectivement, membre de l\’association Yanomami Kurikama*** et coordinateur de l\’association Service et Coopération avec le peuple Yanomami – SECOYA, sont allés à la rencontre de nombreuses classes dans les collèges genevois. Le jour de la marche, Carlito a expliqué au public présent les difficultés auxquelles son peuple est confronté.
La marche a aussi eu son côté festif avec la présence d\’une école de capoeira, de deux écoles de samba. La Rotonde du Mont-Blanc a vibré aux sons du carnaval. Les medias genevois ont relayé l\’événement qui est certainement la plus importante manifestation de solidarité de ce type organisée en Suisse. AYA et Terre des Hommes Luxembourg, qui apportent un appui à la SECOYA, étaient également présents lors de cette manifestation.
* Voir AYA Info No 96 / ** Prononcer Ichima / *** Voir AYA Info No 88
Carlito en visite à l\’OMS
Lors de son séjour à Genève, Carlito Ixima, l\’un des premiers Agents Indigènes de Santé – AIS dans le territoire Yanomami, a été reçu pendant une demi-journée au siège de l\’Organisation Mondiale de la Santé – OMS. Il était accompagné par Luisa Prado, membre de AYA, et par le docteur Pedro Albajar Viñas, spécialiste et coordinateur du programme de lutte contre la maladie de Chagas* à l\’OMS, et accessoirement membre d\’AYA. Carlito a rencontré le Directeur du département de contrôle des maladies tropicales négligées et les coordinateurs des programmes de lutte contre la leishmaniose et de l\’onchocercose. On trouve des victimes de la maladie de Chagas chez les personnes, dont des Yanomami, qui travaillent à l\’exploitation des fibres de la Piaçaba (un palmier). La leishmaniose est aussi liée à l’extraction et commercialisation des produits de la forêt amazonienne ainsi qu\’à des évolutions environnementales, telles que la déforestation, la construction de barrages, les systèmes d\’irrigation et l\’urbanisation. L\’onchocercose, couramment appelée « cécité des rivières » est l\’une des principales causes de déficiences visuelles.
Carlito a encore rencontré des responsables du réseau chargé de fournir de la documentation adaptée aux personnes et entités sanitaires engagées sur le terrain. Ses interlocuteurs se sont engagés à lui faire parvenir une « Bibliothèque bleue » qui est un ensemble d\’ouvrages en portugais sur les maladies tropicales dont un exemplaire du très connu « Onde não há médico » (Où il n\’y a pas de médecin). Ils ont également souhaité recevoir des informations sur l\’état de santé de la population dans l\’aire Yanomami. Le début d\’une collaboration plus concrète est à entrevoir…
* Voir AYA Info No 81 et No 49
Un nouveau président à la tête de la FUNAI
Les 25 et 26 septembre, la presse brésilienne a annoncé la volonté de Maria Augusta Boulitreau Assirati de démissionner de la présidence de la Fondation Nationale de l\’Indien – FUNAI, un poste qu\’elle a assuré de façon intérimaire depuis juin 2013*. Selon l\’information diffusée, elle renonce à sa charge pour préparer un doctorat au Portugal. Elle était la deuxième femme, après Marta Maria Azevedo, à être placée à la tête de l\’organisme chargé de la protection des Indiens. C\’est un poste où les titulaires changent souvent. Maria Augusta en était la 33e présidente depuis 1967, date de la création de la Fondation, qui avait succédé à la Société de Protection des Indiens – SPI.
La démission de Marta Augusta, sans que soit annoncée la nomination d\’une, ou d\’un nouveau, responsable a inquiété l\’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB. Celle-ci a publié une lettre ouverte adressée à Aloizio Marcadante, Ministre Chef de la Maison Civile de la Présidence de la république, au Ministre de la Justice, José Eduardo Cardoso et à Débora Duprat responsable de la 6e Chambre de Coordination et Révision du Ministère Public Fédéral en charge des questions des Peuples Indigènes : « L\’absence d\’un(e) président(e) empêche la poursuite des actions en cours qui relèvent essentiellement de la responsabilité de la FUNAI, de l\’appareil étatique et de la gestion gouvernementale… » L\’APIB relève que la gestion de l\’ex-présidente a été marquée par le dialogue avec le mouvement indigène, la défense des droits conquis et le renforcement de l\’autonomie des peuples indigènes. « Nous insistons pour que, dans le futur, les actions soient inspirées de ces principes, garantissant la participation des peuples indigènes.« 
De fait, la vacance n\’a pas duré. Le 10 octobre le journal officiel de l\’union publiait les arrêtés relatifs à la démission de Maria Augusta et la nomination de Flávio Chiarelli Vicente de Azevedo, nouveau président – par intérim – de la FUNAI. Le nouveau Président est issu de la FUNAI elle-même. Il assumait la tâche de Procureur–Chef national lié à la Fondation. Ce service est chargé, entre autres, de la défense des intérêts individuels et collectifs indigènes. Flávio Chiarelli a présidé la 25e réunion ordinaire de la Commission Nationale de Politique Indigéniste – CNPI qui a eu lieu le 16 octobre.
* Voir « AYA Info » No 84 du 27/06/13, No 71 (avril 2012 et No 70 (mars 2012).
Élections brésiliennes : le deuxième tour ce 26 octobre
Les medias l\’ont largement évoqué, comme en 2010, il y a un second tour pour l\’élection présidentielle avec les deux candidats arrivés en tête le 5 octobre : Dilma Rousseff (PT*) a recueilli plus de 43 millions de voix soit 41,59 % des suffrages et Aécio Neves (PSDB*) près de 35 millions, soit 33,55 %. Dans les premiers « viennent ensuite », on trouve : Marina Silva (PSB*) avec plus de 22 millions de voix, soit 21,32 %. Elle avait été deuxième dans les sondages pendant plusieurs semaines. Loin derrière Luciana Genro (PSOL*) avec 1,6 millions de votes, soit 1,55 %. Pour le deuxième tour, Marina Silva soutient Aécio Neves.
Pour ces élections, le Tribunal Supérieur Électoral a publié la liste des candidats selon leur origine ethnique, dont ceux qui se sont auto-déclarés « Indigènes ». Dans l\’État de Roraima**, la tentative de placer Mário Nicácio à l\’Assemblée Législative de l\’État et Aldenir Wapichana, à la Chambre des Députés a échoué. Le premier est arrivé en 40e position avec 2’064 voix. Le second arrive en 25e position avec 1’936 voix.
Deux des candidats auto-déclarés « Indigènes » ont été élus. José Carlos Nunes da Silva, candidat député à l\’Assemblée législative de l\’État du Espirito Santo a été élu avec 26\’749 voix, sur une liste du PT. C\’est un leader du syndicat des employés de commerce de la Centrale Unique des Travailleurs – CUT. Ses liens avec l\’un ou l\’autre des peuples indigènes ne sont pas mentionnés. Le deuxième élu est Paulo Guedes, candidat député à l\’Assemblée Législative du Minas Gerais également sur une liste du PT. Il a été élu avec 164\’831 voix. C\’est un enseignant. Il va assumer un 3e mandat dans cette Assemblée. Il affirme avoir des liens avec le peuple Xakriabá*** qui occupe plusieurs Terres Indigènes dans cet État.
Globalement, la question de la représentation politique des peuples indigènes reste posée. Il n\’y a toujours pas de représentant indigène à la Chambre des députés.
Avant le deuxième tour, l\’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB a publié une lettre ouverte aux deux candidats à la présidentielle : « Le mouvement indigène, par l\’APIB, manifeste son indignation sur la manière avec laquelle les grands partis qui contrôlent le pouvoir dans le pays déconsidèrent les droits constitutionnels de nos peuples originaires. Fait qui se reflète dans la manière dont ce thème a été systématiquement ignoré dans la campagne électorale« . L\’APIB rappelle qu\’est public et notoire le mépris manifesté envers les peuples indigènes par le premier gouvernement de la présidente Dilma Rousseff… « elle a permis que son ministre de la justice paralyse complétement les démarcations des terres dans le pays« . Quant au candidat Aécio Neves, l\’APIB lui reproche notamment son appui à la Proposition d\’Amendement Constitutionnel 215 – PEC 215 (qui veut transférer au Congrès le droit à la démarcation des Terres Indigènes). Dans ces conditions, l\’APIB adresse à nouveau aux deux candidats la lettre envoyée aux présidentiables avant le premier tour. L\’Articulation rappelle que les revendications historiques des indigènes sont toujours négligées. « Nous annonçons que nos peuples indigènes de tout le pays continueront la lutte pour la démarcation de nos terres, la santé, l\’éducation différenciée et la défense de l\’environnement« .
* PT – Parti des Travailleurs; PSDB – Parti de la Sociale Démocratie Brésilienne; PSB – Parti Socialiste Brésilien; PSOL – Parti Socialisme et Liberté
** Voir AYA Info No 96
*** Prononcer Chakriabá
La 1ère Conférence mondiale sur les Peuples autochtones
Dans le monde on compte plus de 370 millions de personnes indigènes (soit plus de 5 % de la population mondiale), répartis dans environ cinq mille groupes distincts, dans près de 90 pays. Les 22 et 23 septembre, au siège des Nations Unies à New York a eu lieu la 1ère Conférence mondiale sur les peuples autochtones, un événement décidé par l\’Assemblée générale en décembre 2010. À l\’ordre du jour, trois tables rondes pour débattre : des actions du système des Nations Unies pour la mise en œuvre des droits des peuples indigènes; de l\’application des droits des peuples indigènes aux niveaux national et local, et enfin des ressources, territoires et terres des peuples indigènes. Le document final adopté par l\’Assemblée générale avait fait l\’objet de plusieurs versions travaillées au cours de diverses rencontres préparatoires. Il a été rédigé avant même le début de la Conférence. Il comprend une quarantaine de paragraphes où les chefs d\’États et de gouvernements affirment leur appui à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée en 2007. Ils affirment leur engagement à soutenir les droits économiques, sociaux et culturels de ces peuples qui sont relativement détaillés. Cependant, il ne contient pas de paragraphe spécifique sur le droit à l\’autodétermination alors que ce droit figure bien aux articles 3 et 4 de la Déclaration de 2007. L\’exercice de ce droit a été revendiqué dans les réunions continentales préparatoires réunissant les organisations indigènes. Il figure également dans le document adopté par les représentants d\’organisations autochtones des sept régions géopolitiques mondiales réunis à Alta (Norvège) en juin 2013.
À New York, les représentants indigènes présents ont surtout été des spectateurs. Cette conférence a fait l\’objet d\’une critique de la part du professeur Glenn T. Morris, membre de l\’American Indian Mouvement du Colorado. Il reproche notamment la non reconnaissance, par la Conférence, du droit à l\’autodétermination, du droit des peuples indigènes à contrôler leurs territoires, leurs ressources naturelles et connaissances traditionnelles.
La délégation officielle du Brésil était composée de quatre indigènes : Tonico Benites (Guarani Kaiowá), Naiara Yusy Dolabella Sampaio (Tukano), Simone Eloy Amado (Terena), Francisca Navantino Pinto de Angelo (Paresí) et du Ministre de la Justice, José Eduardo Cardozo. Celui-ci a affirmé la nécessité d\’assurer le droit des peuples indigènes et garantir leurs territoires.
Lors de la 25e réunion de la Commission Nationale de Politique Indigéniste – CNPI qui a eu lieu le 16 octobre, Francisca Paresí, elle-même déléguée, a regretté la faiblesse de la représentation indigène brésilienne. La Fondation Nationale de l\’Indien – FUNAI, qui n\’était pas représentée à la Conférence, en a publié le document final.
Bernard Comoli
Important : L\’activation des liens hypertextes renvoie aux sources utilisées pour la rédaction de ce bulletin. Elles sont souvent en portugais, sauf quand il s\’agit d\’anciens « AYA Info ».
PS : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et parfois illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l\’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
AYA – Appui aux indiens Yanomami d\’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2

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