Le roi de Norvège chez les Yanomami / Une nouvelle offensive pour modifier le processus de démarcation / Belo Monte : le chantier est occupé pour la deuxième fois en un mois / Les violences commises contre les indiens pendant la dictature militaire.
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Le roi de Norvège chez les Yanomami
Le roi de Norvège, Harald V, répondant à une invitation de Davi Kopenawa, a passé quatre jours, du 22 au 25 avril, dans la communauté Watoriki, un village yanomami du bassin du rio Demini situé à 150 km de Boa Vista, la capitale de l\’État de Roraima. Initialement, Davi avait invité le souverain à participer, en octobre 2012, à la commémoration des 20 ans de la démarcation de la Terre Indigène Yanomami. De son côté, le roi souhaitait connaître le quotidien d\’une communauté indigène de la forêt. Il n\’a pas hésité à dormir sur place, dans un hamac. Il était accompagné d\’une délégation réduite. Les Yanomami lui ont fait part de leurs craintes devant l\’ambition des « blancs » de pratiquer l\’exploitation minière dans les Terres Indigènes. Ils ont réaffirmé que pour eux, la forêt n\’a de sens que « sur pied ». Le roi a fait part de ses impressions sur le vécu de ses hôtes : « J\’ai l\’impression qu\’ils sont bien avec la vie qu\’ils ont. Cela a été fascinant de les écouter imiter le cri des animaux qu\’ils attirent pour les chasser et ainsi obtenir leur nourriture ». L\’interview peut être vue sur YouTube. Cette visite s\’explique en raison de l\’appui donné depuis plusieurs années par la Norvège au programme d\’éducation des Yanomami. Au début du mois de mai, la FUNAI a commencé le retrait des six fazendeiros qui s\’étaient installés illégalement sur la terre des Yanomami dans la région du rio Ajarani dans la municipalité de Caracaraí, une commune de l\’État de Roraima aux abords de la route BR-210, appelée « Perimetral Norte ». La Fondation a remis ces propriétés à Dário Vitório Kopenawa, membre de l\’Hutukara Associação Yanomami – HAY. Voilà de nombreuses années que les Yanomami se plaignent de l\’invasion des fazendeiros et en demandent l\’évacuation.
Voir AYA Info No 77
Une nouvelle offensive pour modifier le processus de démarcation
Le 8 mai à Brasilia, la « Commission de l\’agriculture, élevage, approvisionnement et développement rural » de la Chambre des députés, a invité la Ministre-cheffe de la Maison civile de la Présidence de la république, Gleisi Hoffmann, à donner, à l\’occasion d\’une audience publique, « des éclaircissements au sujet de l\’identification et la délimitation des terres indigènes au Brésil ». Et la ministre d\’annoncer que les études de la Fondation Nationale de l\’Indien – FUNAI en charge de la politique indigéniste et du processus de démarcation des Terres Indigènes, seront confrontées avec celles d\’autres organes gouvernementaux comme le Ministère du développement agraire et l\’Entreprise Brésilienne d\’Enquête d\’Agro-élevage – EMBRAPA. Selon la ministre, cette proposition a pour objet d\’éviter les conflits entre agriculteurs et indigènes comme il en existe dans plusieurs États du pays. De fait, elle souhaite donner plus de poids aux intérêts anti-indigènes, ceux de l\’agrobusiness, dans le processus de démarcation. Elle met en cause le travail de la FUNAI*. Le débat qui a suivi son intervention a connu des moments de tension entre partisans et adversaires de cette proposition. La controverse a gagné le pays tout entier. Les tenants de l\’agrobusiness ont multiplié les critiques à l\’égard de la FUNAI. Ils ont multiplié leurs interventions. Le 15 mai, des députés ont officialisé une demande de création d\’une Commission Parlementaire d\’enquête sur l\’action de la FUNAI et de l\’Institut National de Colonisation et de Réforme Agraire – INCRA. Les membres du « Frente Parlamentar da Agropecuária » – les parlementaires du lobby de l\’agrobusiness – se sont réunis par deux fois, les 16 et 28 mai, avec le vice-président de la république Michel Tremer. Ils lui ont demandé la suspension des processus de démarcation des Terres indigènes dans les deux États du Mato Grosso do Sul et du Rio Grande do Sul. Ceci à l\’exemple de ce qu\’avait demandé récemment Gleisi Hoffmann pour l\’État du Paraná. Les parlementaires ont annoncé, pour le 14 juin, une mobilisation nationale des producteurs ruraux contre la désappropriation de terres productives pour des fins de démarcation. Les organisations indigénistes ont souligné ce recul de la politique gouvernementale à l\’égard des peuples indigènes. Ils reprochent au gouvernement d\’avoir choisi le camp des « ruralistes ». Le Conseil Indigène de Roraima – CIR a publié un manifeste : « Nous voulons que la présidente du Brésil, Dilma Rousseff, respecte et reconnaisse tous les peuples indigènes pour les conquêtes des droits acquis jusqu\’aux jours actuels et qu\’elle ne fasse pas des actes d\’ignorance et de méconnaissance de la question indigène. Les terres brésiliennes sont des terres indigènes« .
* La démarcation des Terres indigènes a fait l\’objet d\’un Décret de 1996 (No 1775/96) qui prévoit la possibilité pour les opposants à une démarcation de faire connaître leur point de vue.
Belo Monte : le chantier est occupé pour la deuxième fois en un mois
Le 2 mai, environ 200 indigènes ont occupé le chantier principal de construction de l\’usine hydroélectrique de Belo Monte* à Vitória du Xingu. Les occupants sont de divers peuples touchés par la construction de barrages sur les rios Xingu, Tapajós et Teles Pires. Ils demandent l\’organisation d\’une véritable consultation préalable comme cela est prévu par la Convention 169 de l\’OIT. La justice a ordonné leur évacuation après huit jours d\’occupation. Ils ont quitté le chantier le 9 mai. Le 7 mai, le ministre Gilberto Carvalho, chef du Secrétariat de la présidence de la république, a adressé un courrier aux occupants leur proposant de les rencontrer à la condition qu\’ils évacuent le chantier. Le 6 mai, son Secrétariat avait publié une note critiquant l\’attitude des leaders Munduruku. Pendant cette période d\’occupation, les forces de l\’ordre ont inquiété des journalistes qui couvraient l\’événement. Elles ont également empêché le député fédéral Padre Ton de prendre contact avec les occupants. Le 27 mai à l\’aube, les indigènes ont à nouveau occupé le chantier. Ils demandent la suspension des travaux et des études concernant les barrages prévus dans leurs territoires. Ils exigent que la consultation préalable – avec droit de veto – soit réalisée. Ils reprochent au gouvernement de ne pas être venu dialoguer avec eux alors qu\’ils avaient quitté le chantier. Ils demandent que la présidente de la république, Dilma Rousseff, vienne les rencontrer. Le 28 mai, une nouvelle fois, la justice a autorisé les forces de l\’ordre à procéder à l\’évacuation du chantier. Ce 30 mai, un représentant du Secrétariat de la présidence de la république est venu proposer aux occupants d\’envoyer une petite délégation à Brasilia pour rencontrer Gilberto Carvalho le 4 juin. Cette rencontre est proposée à la condition que les indigènes évacuent le chantier et que les Munduruku retournent sur leur territoire. Cette proposition a été refusée. Les indigènes veulent que la rencontre ait lieu sur le chantier. À suivre…
* Belo Monte sur le rio Xingu sera le troisième grand barrage au monde après celui d\’Iguaçu, à la frontière entre le Brésil et le Paraguay et celui des Trois Gorges en Chine.
PS : Cette note a été rédigée d\’après les informations diffusées par les sites du « Movimento Xingu Vivo para Sempre » : http://www.xinguvivo.org.br/ , du Conseil Indigéniste Missionnaire http://www.cimi.org.br/site/pt-br/ et du Secrétariat Général de la présidence de la république : http://www.secretariageral.gov.br/noticias/ultimas_noticias/2013/05 (voir les « Notícias » des 6, 7 et 29 mai)
Les violences commises contre les indiens pendant la dictature militaire
Le 22 mai, sur la proposition du sénateur Randolfe Rodrigues, la Commission des Droits Humains et de la législation participative – CDH du Sénat, a tenu une audience publique pour débattre des violences pratiquées, par des agents publics ou privés, contre des indigènes pendant les années 60, au moment de la dictature militaire. Cette demande fait suite à la découverte, en avril dernier, au Musée de l\’Indien de Rio de Janeiro, du « Rapport Figueiredo ». Il s\’agit d\’un document de plusieurs milliers de pages, rédigé à la fin des années 60, par le Procureur Jáder Figueiredo Correia à la demande du Ministre de l\’intérieur de l\’époque, le général Afonso Augusto de Albuquerque de Lima. Il s\’agissait d\’évaluer les dénonciations formulées à l\’encontre du Service de Protection de l\’Indien – SPI auquel a succédé, en 1967, la Fondation Nationale de l\’Indien – FUNAI. Le SPI avait pour mission « d\’intégrer » les indigènes à la société brésilienne ! Ce document que l\’on croyait avoir été détruit dans un incendie a été retrouvé par des chercheurs, dont le vice-président de l\’association « La torture jamais plus », Marcelo Zelic. Le rapport décrit les divers types de tortures infligés aux indiens : broyer les chevilles, chasse humaine à la mitrailleuse, distribution de sucre empoisonné et massacre de tribus entières, etc. La Commission veut demander au Ministère de la justice et au Ministère public la punition des responsables. Elle veut aussi demander des mesures pour réparer et indemniser les victimes. Un consensus général s\’est dégagé en son sein que ce rapport soit examiné en fonction de l\’actualité, c\’est-à-dire de barrer la route aux propositions actuellement en examen devant le Congrès dont le but est de faire obstacle à la démarcation des Terres Indigènes.
Bernard Comoli
Important : L\’activation des liens hypertextes renvoie aux sources utilisées pour la rédaction de ce bulletin. Elles sont souvent en portugais, sauf quand il s\’agit d\’anciens « AYA Info ».
PS : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l\’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
AYA – Appui aux indiens Yanomami d\’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2