Brésil: la santé et l’alimentation au coeur du projet d’un couple fribourgeois

Cristiane Costa Santana Zurkinden et son mari Guy Zurkinden ne manquent pas de courage. En compagnie du petit Nilo, ce couple de trentenaires fribourgeois va travailler durant trois ans dans le Nordeste brésilien afin d’y promouvoir la santé et la souveraineté alimentaire. Pour relever ce défi, le trio s’appuiera sur le travail effectué par le Mouvement des Sans Terre de Sergipe, dans la région du Nordeste où travailleront les deux coopér-acteurs E-CHANGER. Petite prise de température en compagnie de la volontaire, quelque jours avant le départ au cours de l’été 2011.
Elle n’a pas l’air inquiète, Christiane Costa, peut avant le départ. Au contraire, bien que les cartons soient loin d’être terminés, elle ne ménage pas ses efforts pour expliquer son projet. Mais avant d’entrer plus dans les détails, une petite présentation des coopér-acteurs s’impose. Comme son nom de famille l’indique, Cristiane est née au Brésil, dans la région de Sergipe. Elle y passera les dix-neuf premières années de sa vie, avant de partir à Cuba pour y suivre une formation de médecin, profession qu’elle exerce aujourd’hui en Suisse. Quant à son mari Guy, antropologue et journaliste, il a beaucoup voyagé, notamment en Bolivie. La pauvreté est donc une réalité déjà côtoyée par les deux coopér-acteurs. «Et j’allais oublier de citer le 3e volontaire pour l’aventure, rigole Christiane Costa. Notre fils Nilo, du haut de ses cinq mois, nous accompagnera.»
 
Une des régions les plus pauvres du Brésil
 
Passons maintenant au projet. «Il s’agit d’un premier engagement pour nous, précise la médecin. Nous nous rendons au Brésil car nous sommes frappés par les inégalités au niveau général. Environ 1% des grands propriétaires disposent de 54% des terres.» Et le Nordeste est loin d’être un endroit privilégié. «Il s’agit d’une des régions les plus pauvres du Brésil, explique la coopér-actrice. Elle doit faire face à des périodes de sécheresse, ce qui complique la vie en campagne et dans les villes, où les produits de qualités deviennent rares. Sergipe est le plus petit des 26 Etats du Brésil. Deux millions d’habitants y vivent et la population continue de s’accroître. L’exode rural est fréquent en raison de la sécheresse, ce qui contribue à une diminution des coûts du terrain.» Et ce dernier point ne constitue pas une bonne affaire pour les plus démunis. En effet, les riches propriétaires en profitent pour mettre la main sur des énormes surfaces.
 
Face à ces difficultés et ces inégalités, les Brésiliens ne peuvent rester les bras croisés. «Le MST de Sergipe est un grand mouvement, qui rencontre beaucoup de succès, se réjouit Cristiane Costa. Il s’est implanté dans le Nordeste au début des années 1990. Il entretient des relations avec le gouvernement local ainsi que des universités privées. Dans une région victime des sécheresses, le MST a mis en place un système d’irrigation pour améliorer l’agriculture.» La situation du mouvement est nettement meilleure que dans d’autres Etats, où des leaders du MST sont assassinés par des milices privées ou des gouvernements réactionnaires.
 
Cristiane Costa se focalisera principalement sur la santé, un domaine où des différences entre les lois et la réalité se font sentir. «A partir de 15’000 familles, une unité de santé comprenant un médecin généraliste, un infirmier, un dentiste et trois techniciens de santé, doit être mise à disposition du MST.» C’est loin d’être le cas sur le terrain; notamment en raison d’un manque de médecins. Environ 75% des docteurs préfèrent exercer leur profession dans les villes, malgré des salaires inférieurs. «Il existe une demande qu’il faut canaliser, estime la Fribourgeoise. On ne peut pas vraiment dire qu’il y a un déficit d’intérêt pour la campagne de la part des autorités politiques. Le problème se situe surtout dans la circulation de l’information. Les familles du MST ne connaissent pas toujours leurs droits. Mon mari va travailler dans ce domaine afin d’améliorer la situation.»
 
Priorités aux médecines naturelles
 
Au niveau des soins Cristiane Costa, souhaite explorer quelques pistes. Tout d’abord, elle désire développer la prévention. «On y a trouve des maladies spécifiques et des accidents provoqués par des outils de travail typiques de la campagne, explique-t-elle. L’analphabétisme est également un problème.» Plus globalement, elle voit dans la prévention un thème transversal.
 
La cooper-actrice est également convaincue que la médecine naturelle a beaucoup d’avenir dans la région. Elle désire implanter davantage la phytothérapie. «Il est nécessaire de dissiper les doutes vis-à-vis de ce type de médecine pour convaincre aussi bien la population et que les autorités », déclare-t-elle. Ses convictions se trouvent renforcées par les avantages de cette médecine naturelle. «Le matériel nécessaire est présent, encore faut-il savoir s’en servir, estime Cristiane Costa. La phytothérapie est plus efficace, plus accessible et moins chère, mais il faut bien l’utiliser. Un mauvaise dosage peut transformer un remède en un poison.»
 
Face à un projet aussi vaste, difficile de se fixer des priorités. «Je m’attaque à un très grand défi, juge-t-elle. Avant de partir, il m’est impossible de dire précisément quel sera mon premier cheval de bataille. Je vais voir quelle seront les attentes sur places. Nous avons défini quatre axes avec mon mari mais il est inévitable de s’adapter, conclut-elle.»
 
 
Yoan Veya
collaboration de presse E-CHANGER
 
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Amis de sans terre, le groupe de soutien
Cristiane Costa et Guy Zurkinden sont aidés par le groupe de soutien Amis des sans terre, qui se trouve en Suisse. Il est notamment possible de manifester son soutien au projet avec un don.(CP – 17-7786-4, E-CHANGER, Rue St-Pierre 10, 1700 Fribourg, mention: groupe de soutien Amis de la terre – MST Brésil).

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