Bolivie: Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique et la Terre Mère

La Conférence mondiale des peuples sur le changement climatique et les droits de la Terre Mère s’est ouverte ce lundi 19 avril à Tiquipaya, petite ville de la vallée de Cochabamba, située à 2500 mètres d’altitude, au cœur de la Bolivie. 
Cette conférence, convoquée par le gouvernement d’Evo Morales, a pour but de suppléer à l’échec de la Conférence sur le climat organisée par les Nations Unies en décembre passé à Copenhague. 
 
Le gouvernement bolivien et les mouvements sociaux qui le composent ont appelé les peuples du monde, à travers leurs organisations et mouvements sociaux, à venir discuter et proposer un cadre et des propositions concrètes pour faire face au changement climatique et aux dégâts que subissent les écosystèmes et les peuples du monde entier.

Après un jour et demi, la convocation semble une réussite. Si un bon millier d’inscrits en provenance d’Europe n’ont pas pu venir – certains y voient un signe de la mauvaise humeur d’une Pachamama blessée à mort – l’affluence est plus qu’à la hauteur des organisateurs. On compte environ 15’000 participants, dont une bonne moitié de boliviennes et de boliviens, l’autre moitié provenant des cinq continents.
 
Lundi matin, dernière journée d’inscriptions, une queue longue de plusieurs centaines de mètres dans le centre –ville, attendant dans la bonne humeur leur accréditation, témoignait de ce succès … et des quelques difficultés d’organisation inhérentes à ce genre d’événement.

L’atmosphère qui règne sur le campus qui sert de principal lieu des activités est très chaleureuse, et les allées sont encombrées de stand de nourriture – en Bolivie, on ne travaille pas le ventre vide – d’artisanats écologique et équitable, d’artistes de toutes sortes, d’organisations et d’ONG qui présentent leur travail, diffusent leurs documents, livres ou vidéos, ainsi que des différents ministères boliviens.
 
On se retrouve dans une ambiance de partage, de travail, de fête, mais surtout de soucis pour la planète, qui fait beaucoup penser aux Forums Sociaux Mondiaux.
Les 17 groupes de travail, chargés d’élaborer, à partir de cyber-forums qui ont fonctionné depuis le mois de février, des propositions et des réflexions sur les causes structurelles du changement climatique, des droits de la Terre Mère, la création d’un tribunal international de justice climatique, de la dette climatique, des transferts de technologie, de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, etc., se sont mis au travail.
 
Si le gouvernement bolivien met en place l’infrastructure et les propositions générales et est très présent, les groupes de travail s’organisent de façon démocratique et horizontale. Il sera néanmoins difficile de parvenir à une réflexion profonde et consensuée dans des groupes qui comptent plusieurs centaines de personnes, et qui disposent de peu de temps pour rendre leur copie.

Les propositions et les témoignages sont extrêmement variés, chacun veut apporter sa pierre à la réflexion, et on sent parfois une certaine confusion. Cependant, il existe un large consensus, qui réside dans la radicalité du rejet du système capitaliste. « Ou c’est le capitalisme qui meurt, ou c’est la planète » est en effet une phrase-choc que l’on a pu entendre non seulement de la bouche d’Evo Morales dans son discours d’inauguration, mais de la part de féministes latino-américaines comme du sociologue portugais Boaventura Do Santos, de la bouche des représentants paysans d’Afrique aux simples participants.
 
A l’unisson, on demande la fin du modèle capitaliste occidental, qui transforme tout en marchandises et en profits, laissant derrière lui des des peuples défavorisés et une planète dévastée.
 
Les alternatives existent, mais semblent encore embryonnaires. Ainsi, pour Fernando Mamani, indien Aymara et auteur d’un livre intitulé « Vivre bien »,  la philosophie de vie des indigènes des Andes s’oppose à la manière de voir occidentale qui recherche le salut dans le « plus » ou dans le « mieux ». Selon lui, le « Sumaq Kamana » (Bien Vivre), pourrait féconder toutes les sociétés, pour diriger l’humanité vers un futur véritablement soutenable, grâce à des nouveaux rapports harmonieux entre les êtres humains entre eux et avec la Terre Mère. Car, comme il le souligne, pour les peuples indigènes « la terre ne nous appartient pas, mais c’est nous qui lui appartenons ».

 
 
Mathieu Glayre, coopér-acteur E-CHANGER
de Tiquipaya, Cochabamaba, Bolivie
Collaboration presse  E-CHANGER

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