Denervaud : « Le combat contre les inégalités, nous ne pourrons pas le mener seul. »

Dernier volet d’une interview triptyque, les défis à venir de la coopération internationale, ainsi que les moyens pour y remédier sont développés par Jean-Marc Denervaud et Yanik Marguerat. Malgré tous les efforts consentis, la FGC espère un mouvement plus global afin de pallier aux inégalités de ce monde. Auriez-vous envie de vous engager ?

Quels sont les défis de la coopération au développement pour demain ?

La lancée actuelle va perdurer. Sommes-nous capable de créer des conditions pour que les gens deviennent acteurs de leur changement, de leur  fournir des outils de base pour le faire ou plutôt  de  les accompagner dans l’élaboration de leurs propres outils. L’un des principaux enjeux réside au niveau de la  garantie  des biens publics fondamentaux sans lesquels rien n’est possible. C’est un souci qui se confronte à la logique du marché néo-libéral, qui crée de plus en plus d’inégalités. Le rapport de force entre les deux mouvements- c’est cela le vrai enjeu des années à venir. Mais je ne suis pas devin.

Dans notre déclaration de principes, nous affirmons vouloir combattre les inégalités. C’est le « SMIC » de la coopération. Ce combat, nous ne pourrons pas le mener seul. On ne modifie pas des tendances lourdes avec des moyens modestes. On espère un mouvement plus général de transformation sociale dont on est un petit acteur.

Quel conseil donneriez-vous à une jeune personne qui veut s’engager dans la coopération internationale ?

Vas-y ! (rires) On a souvent des civilistes qui ont envie de venir pour comprendre ce qu’on fait. Ce sont des expériences très enrichissantes. Enfants du monde font leurs camps dans une optique multiculturelle. Il existe des tas de moyens.

Je les encouragerais à trouver des pratiques qui donnent un peu de poids ou de solidité à leur idéalisme. On n’imagine pas toujours la même chose dans sa chambre ou au bistro. Le mieux est d’aller sur place ou de s’engager dans une association pour se rendre compte des « grâces et des lourdeurs » de la coopération internationale.

C’est intéressant de retrouver un peu plus tard des hommes ou des femmes politiques qui sont favorables à la coopération. Pourquoi ? Parce qu’ils ont participé une fois, quand elles étaient au collège ou en apprentissage, à une action menée par une association. Il faut oser et mettre la main à la pâte.

Etes-vous favorable aux camps chantiers humanitaires qui se déroulent en un mois ?

C’est difficile à dire. Est-ce qu’on y va pour faire du tourisme solidaire ou pour s’engager réellement ? Pour reprendre l’exemple d’Enfants du monde, ils font un énorme travail avant pendant et après le camp. Ils font réfléchir avant, notamment sur les notions d’inégalités et de coopération au développement. Ils développent des outils d’observation sur place et continuent à en débattre une fois rentrés en Suisse. Si c’est seulement aller passer un mois sur place – pourquoi pas- mais il faut voir les motivations qui poussent ces personnes à s’y rendre. Acquis de bonne conscience ? En tant que formateur d’adultes, je crois en l’éducation populaire et permanente. L’expérimentation y tient une place importante, mais il faut l’inscrire dans un contexte. Cela ne peut pas être quelque chose de ponctuel, décidé comme cela sur un coup de tête.

Yanik Marguerat : Si c’est bien fait, cela peut être extrêmement bénéfique, mais à l’inverse cela peut devenir complètement contreproductif. Tant qu’il y a un échange concret, qu’une rencontre s’opère, je pense que cela a le mérite d’être vécu.

Propos recueillis par Olivier Grobet

Fragments de paroles

Denervaud : «Il existe une tendance à renvoyer la solidarité (ici et ailleurs) au privé »
Denervaud : « Aujourd’hui, on ne peut plus parler du Nord et du Sud, mais plutôt des Nord et des Sud. »
Denervaud :  » Le combat contre les inégalités, nous ne pourrons pas le mener seul. « 

Une réflexion sur « Denervaud : « Le combat contre les inégalités, nous ne pourrons pas le mener seul. » »

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