George Gordon-Lennox : « Nous souhaitons que les jeunes désireux de travailler dans l’humanitaire prennent Sergio Vieira de Mello comme modèle. »

Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire un livre biographique sur Sergio Vieira de Mello ?
 
Je n’y avais pas pensé. C’est l’éditeur, Serge Kaplun des Editions du Tricorne, qui m’a contacté et nous avons décidé de poursuivre son idée. D’ailleurs le livre est un travail « à quatre mains » avec Annick Stevenson, journaliste française qui était porte-parole de Sergio Vieira de Mello au Haut Commissariat pour les droits de l’homme. Sans sa contribution le livre n’aurait pas pu voir le jour. Son apport est extrêmement important, surtout sur la dernière période dans la carrière de notre ami, quand il a eu à assumer de plus en plus importantes responsabilités au Cambodge, dans l’ex-Yougoslavie et, plus tard, au Timor oriental.
 
Quelle relation avez-vous vécu vis-à-vis de cette figure des droits de l’Homme ?
 
C’était un collègue et ami, que j’ai connu depuis ses débuts au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et avec qui j’ai travaillé à plusieurs reprises tout au long des années qu’il a passées au HCR.
 
Comment résumeriez-vous sa vie du Brésil au fameux attentat d’août 2003 à Bagdad?
 
Il l’a défini lui-même, mieux que je pourrais le faire: « Ma vie entière à été un champ de mines ».
 
Après avoir rencontré G.W. Bush, il avait provoqué la consternation de certains de ses collaborateurs en déclarant avec une apparente ingénuité à « Info Dimanche » que le président Bush lui avait promis que les forces US ne tortureraient pas en Irak, même si elles feraient preuve d’un peu de rudesse. Sergio Vieira de Mello était-il partisan d’une guerre, à ses yeux nécessaire, pour autant que le conflit se conforme aux Droits de l’Homme ?
 
Cette citation ne correspond pas à son style. Il a toujours été contre toute guerre, quelle qu’elle soit, mais en tant que Représentant spécial du Secrétaire Général en Iraq, il n’avais pas d’autre choix que d’y aller et de traiter avec la Coalition.  Les droits humains étaient toujours au centre de ses préoccupations, et il s’est donné pour unique mission d’écouter le peuple iraquien et tenter de transmettre ses préoccupations aux puissances occupantes.
 
Reconnu comme un excellent médiateur, il a parfois été décrié comme étant trop conciliant avec les Etats-Unis, notamment dans le cadre de la guerre en Irak. Commissaire naïf ou diplomate aguerri ?
 
Ni l’un, ni l’autre. Il était un fonctionnaire international hors pair, au service des buts les plus nobles des Nations Unies: les droits humains et l’action humanitaire.
 
S’engageant dans le dossier iraquien, M. Mello avait-il conscience que son absence allait priver le Haut Commissariat des Droits de l’Homme de toute initiative ?
 
Il était très conscient que son absence allait affecter le travail du Haut Commissariat. Il ne souhaitait pas entreprendre cette mission en Iraq, et il ne l’a certainement pas cherché (malgré certaines spéculations en ce sens). Mais il n’avait pas d’autre choix que d’y aller, tout en insistant  auprès du Secrétaire Général que sa mission soit la plus courte possible.
 
Avant l’attentat d’août 2003, Sergio Vieira de Mello semblait changer de discours concernant la coalition. Etait-il vrai qu’il était sur le point de rédiger un rapport alarmant au secrétaire général Kofi Annan concernant la situation désastreuse de l’Irak et l’auto-satisfaction médiatique de la coalition?
 
Je ne pense pas qu’il a changé de discours, mais c’est clair qu’il n’a jamais non plus caché son sentiment que le régime de Saddam Hussein ne respectait pas les plus élémentaires droits humains et qu’une démocratisation de ce pays était fortement à souhaiter à condition qu’elle vienne des iraquiens eux-mêmes. Il est vrai que les relations entre l’ONU et la Coalition devenait de plus en plus difficiles. Sergio en avait parlé quand il a fait rapport au Conseil de Sécurité en juillet 2003. Il a beaucoup insisté sur la nécessité d’une plus grande implication des iraquiens eux-mêmes dans les décisions sur leur avenir, et aussi sur le besoin d’améliorer la situation des droits humains. L’action de Sergio et son équipe en Iraq est couverte dans beaucoup de détails dans le chapitre 9 de notre livre, y compris leurs graves préoccupations sur la situation du pays sous l’occupation.
 
A votre avis, qui a été commanditaire de l’attentat du 19 août 2003 ?
 
Je n’en ai pas la moindre idée. Nous disons clairement dans l’Avant-propos du livre que nous ne faisons pas oeuvre de journalistes d’investigation, tout en souhaitant que d’autres le fassent.
 
Après avoir écrit sa biographie, auriez-vous sincèrement envie de prendre comme modèle M. Sergio Vieira de Mello ?
 
Oui, et nous espérons surtout que les jeunes désireux de travailler dans le domaine international le fassent. C’est pour cela que nous avons accepté de faire connaître à travers ce livre la vie professionnelle de cet « homme exceptionnel ».
 
_____________
Propos recueillis par Olivier Grobet

 
« ECLECTIC »

 

Bon de commande du livre >> télécharger la page
Rapport sur la sécurité de l’UN en Irak (octobre 2003) >> télécharger la page
Réagir sur le forum >> Participer au débat
 

 

Laisser un commentaire