Le nord de la Syrie en passe de devenir un nouveau trou noir de l’information

Au lendemain de la mort de deux journalistes dans un bombardement des forces armées turques dans le nord de la Syrie, de nombreux reporters quittent le Kurdistan syrien où la situation sécuritaire ne cesse de se dégrader. Reporters sans frontières (RSF) s’inquiète pour les journalistes locaux restés dans la région et craint qu’elle ne devienne un nouveau trou noir de l’information. L’organisation exhorte les belligérants à respecter leurs obligations internationales en matière de protection des médias.

De nombreux journalistes étrangers ont quitté le nord de la Syrie depuis dimanche 13 octobre. Cette situation est le résultat de la dégradation des conditions sécuritaires et l’avancée des forces du gouvernement syrien, qui a déployé son armée dans le nord-est de la Syrie à la suite d’un accord avec les autorités kurdes de Syrie contre l’offensive de la Turquie. C’est le cas notamment de Feras Kilani, correspondant pour la BBC, qui indique être désormais passé au Kurdistan irakien.

Le même jour, un convoi de civils, accompagné de soldats kurdes et de journalistes a été bombardé à Ras Al-Ayn (Serekaniye), dans le nord de la Syrie, faisant des dizaines de victimes. Le convoi se trouvait entre Qamishli et Ras Al-Ayn, où les Kurdes prévoyaient de manifester contre l’intervention de l’armée turque.

Deux journalistes ont été tués dans ce convoi : Saad Ahmad, correspondant pour l’agence kurde Hawar News (ANHA), ainsi que Mohamed Hossien Rasho, correspondant pour la chaîne kurde basée en Suède, Çira TV. Au moins huit autres ont été blessés, selon l’Union des journalistes syriens kurdes, jointe par RSF. Tous sont des journalistes locaux travaillant pour des médias régionaux tels que les agences kurdes Firat News (ANF) et Hawar News (ANHA), l’agence syrienne North Press (NPA), la chaîne kurde Sterk TV et la chaîne kurde irakienne Rudaw

Le nord de la Syrie menace de se vider de ses journalistes et de devenir un trou noir de l’information si les autorités turques et syriennes ne mettent pas tout en oeuvre pour assurer leur sécurité et leur permettre de faire leur travail, rappelle Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à Reporters sans frontières (RSF). Toute attaque contre les journalistes est strictement prohibée par le droit international, qui impose aux belligérants de protéger les travailleurs des médias au même titre que le personnel humanitaire et les autres civils.

Une équipe de la chaîne France 2, composée de Stéphanie Perez, Nicolas Auer et Yan Kadouch, était également présente à l’arrière du convoi, mais n’a pas été touchée.

Par ailleurs, la connexion Internet dans le nord-est de la Syrie a été coupée dans la nuit de dimanche, ce qui rend l’accès à l’information d’autant plus difficile, rapporte le Rojava Information Center.

Face à la montée des risques encourus par les journalistes, RSF encourage les rédactions à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir le meilleur niveau de protection possible et recommande à ceux qui se rendent sur place de consulter son guide pratique de sécurité des journalistes, disponible en français, anglais, espagnol et arabe.

La Syrie et la Turquie occupent respectivement la 174e et la 157e place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.

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