La coupe du monde terminée, la carte postale dûment distribuée au monde entier, l’heure du bilan pour les mouvements sociaux révèle pourtant un Brésil plus que jamais bipolaire. Un doute ? Durant le coupe du monde, avez-vous seulement vu un-e seul-e noir-e dans le stade de la « Fonte Nova » à Salvador alors que cette ville de près de 4 millions d’habitants en compte 80 %? Non, et si ils étaient là, ce n’étaient tout simplement pas eux qui étaient montrés sur les images TV. De quoi esquisser l’illustration parfaite de la réalité brésilienne, celle d’une élite montante dans un pays émergent où la classe populaire, souvent composée des minorités historiquement discriminées, n’a de loin pas les mêmes privilèges que leurs concitoyens, mais une même classe populaire divisée qui ne veut pas se s’attaquer unanimement au pouvoir en place de peur de perdre au jeu du hasard et de la corruption les quelques avancées indéniables que les trois Gouvernements d’affilée du PT leur ont donné.
Ces inégalités ont toutefois amené le peuple, y compris une partie de la classe moyenne à se manifester de forme spontanée. Les « indignés » du Brésil n’avaient en effet pas forcément de liens directs avec les mouvements sociaux organisés et historiques, qu’ils soient indigènes, sans-terre ou sans-toit. De ce fait pas étonnant de voir qu’à coup de média de masse, l’appareil répressif largement publicisé a enlevé toute force de mobilisation au peuple brésilien. Là où les mêmes médias attendaient de violentes confrontations avec la police, quelques groupes bien coordonnés à l’instar de l’articulation nationale des comités populaires contre la coupe se sont au contraire efforcés de sensibiliser les supporters du monde entier à la cause du peuple brésilien à coup de distribution de fleurs en papier cresson aux alentours des stades ou en opérant d’autres manifestations pacifiques.
Ambassadeurs malgré eux, il s’agit de faire l’écho de l’indignation et le désenchantement d’un peuple qui attend depuis la fin de la dictature militaire des changements sociaux fondamentaux : l’accès à une éducation, à une santé et à des transports publics de qualité. A ce petit jeu de dupe, l’organisation de la coupe du monde a de fait démontré une fois de plus que la corruption gangrène encore ce pays. La main mise sur les richesses d’une élite contraste largement avec les retombées sociales que cette même manne produit auprès des populations les plus vulnérables et que, finalement, une éducation publique de qualité irait probablement à l’encontre des intérêts d’une intelligentsia cherchant à se perpétuer. Les gens de la périphérie sont de fait toujours voués à absorber l’exode rural et la délocalisation du trafic de drogues due aux grands nettoyages de certains quartiers populaires dans les grandes villes ayant accueillis la coupe.
L’insécurité toujours présente, voire grandissante, les inégalités flagrantes et les manquements en terme d’éducation publique justifient pleinement la présence d’ONG internationales telles que Terre des Hommes Suisse au Brésil, pays faisant pourtant partie des huit grandes puissances mondiales juste derrière l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni.
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