Quels sont les points positifs du point de vue du travail?
MAX: À mon arrivée, j’ai trouvé une coopérative (Cooperativa de proyectos agropecuarios de Diriamba, COOPPAD) qui souffrait d’un certain désordre administratif et d’un manque de stratégie. Son travail était amplement reconnu, mais sa gestion très défectueuse. Maintenant que ma mission est achevée, elle dispose d’un plan opérationnel stratégique, applique de nouvelles méthodes de gestion administrative et son personnel est mieux formé, plus conscient de l’importance de la gestion pour parvenir au succès.
Du point de vue social, cette période a été très intense, pleine d’imprévus et marquée par des échanges interpersonnels très riches avec les communautés rurales. La simplicité des gens, leur hospitalité et leur disponibilité ont été un privilège. Je souhaite à tous les acteurs de la coopération internationale de faire un jour une expérience semblable. Les relations humaines dont j’ai bénéficié m’accompagneront tout au long de ma vie et m’aideront à prendre des décisions.
SASKIA: « Toute graine que tu sèmes deviendra un arbre couvert de fruits… à la condition que la terre soit fertile et que tu en prennes soin ». Le vrai changement se produit seulement s’il s’établit un échange à plusieurs niveaux : si l’on fortifie l’individu, mais aussi les structures -gouvernementales et non gouvernementales- pour qu’elles puissent satisfaire les besoins de la base et prendre en compte les propositions qu’elle fait.
Quelle est la principale « plus-value » qu’a laissé votre travail ?
MAX et SASKIA: Le travail et la méthodologie que des professionnels étrangers comme nous peuvent apporter localement inspirent une grande confiance. Travailler à la base et avec la base permet de mieux comprendre ses besoins. Nous avons constaté dans la population rurale un grand désir d’échanger avec nous, d’apprendre en faisant, de mettre en commun les techniques et les connaissances.
… et le sentiment le plus négatif?
MAX: L’impression que l’on aurait pu faire plus, avancer davantage. Le « choc » culturel, inévitable dans un échange nord-sud, a fait que parfois nous n’avons pas pu réaliser tout ce que nous avions planifié. La difficulté la plus grande dans la coopération sur le terrain est peut-être le risque de dépendance qu’elle peut entraîner.
SASKIA: Constater que les Nicaraguayens arrivent à peine à survivre alors que la richesse de ce pays merveilleux est évidente me rend triste. Surtout qu’il y a des gens qui sont en position de changer durablement la situation mais ne le font pas.
Avez-vous quelques suggestions quant à l’engagement futur de la coopération au Nicaragua?
MAX et SASKIA: Le pays a de grands besoins dans le domaine de l’éducation, dans l’agriculture, dans la formation des paysans aux techniques alternatives de production, car le Nicaragua est dans une situation d’urgence pour ce qui est de l’environnement. Ce que nous voulons dire aux futurs coopér-acteurs, c’est qu’ils doivent bien se préparer, tant au niveau professionnel qu’émotionnel. Ils auront besoin de patience, d’engagement et de beaucoup d’amour pour ce qu’ils font, sans quoi ils vont vite se sentir frustrés.
Vous étiez soutenus par *SEMILLA*, un groupe d’appui actif. Quel a été son apport à distance ?
MAX: Il a été très important. Quand on arrive sur le terrain, on ressent un certain sentiment de solitude. Pouvoir parler de notre travail m’a aidé à affronter les difficultés auxquelles on se heurte inéluctablement.
SASKIA: Le groupe a accru ma motivation. Il nous a aussi permis de ne pas oublier que notre travail était à double sens. Tout d’abord, remplir la mission définie avec le partenaire local. Mais aussi concrétiser notre engagement d’améliorer les relations nord-sud, en travaillant en Suisse, dans le nord, à une meilleure compréhension des difficultés qui existent dans les pays du sud et en encourageant une réflexion critique sur l’origine de ces inégalités qui proviennent des systèmes économiques et politiques dominants dans les pays développés.
Un dernier mot, et pas le moindre: nous avons apprécié les visites d’amis, de membres du groupe d’appui, de délégations. Elles nous ont fait sentir que nous étions véritablement un pont entre deux sociétés.
Sergio Ferrari