Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 36 Genève, le 26 février 2009

De nombreux indigènes au FSM; Un indien Ye’kuana tué par des garimpeiros; Raposa Serra do Sol, dans l’attente du jugement; Des Yanomami veulent protéger des lieux sacrés; La réunion du Conseil du District sanitaire Yanomami

 » AYA Info » peut être consulté sur les sites Internet :
De nombreux indigènes au FSM*
Avec la chaleur humide et la pluie, les participants au Forum Social Mondial (FSM) réunis à Belém du 27 janvier au 1er février, ont eu un aperçu de la réalité physique de l’Amazonie. Cette édition du FSM aura été particulièrement marquée par la participation des peuples indigènes. Leur présence dans le cortège d’ouverture du Forum et la banderole humaine « SOS Amazônia » ont été largement médiatisées. Belém a été l’occasion de nombreuses rencontres indigènes aux niveaux de l’Amérique latine, du Brésil, de l’Amazonie et de l’une ou l’autre de ses régions. Les membres d’une trentaine d’organisations indigènes d’une dizaine de pays latino-américains ont signé une « Déclaration des peuples indigènes » face à la crise de la civilisation occidentale capitaliste. Les entités regroupées au sein de la Coordination des Organisations Indigènes du bassin Amazonien (COICA) ont publié un texte relatif au salut de la planète. Les organisations indigènes et indigénistes de la vallée du Javari (à l’ouest de l’État d’Amazonas) et de l’État de Roraima ont publié des textes dénonçant les graves conséquences des déficiences du service de santé indigène dans ces deux régions. Vingt-six organisations brésiliennes ont saisi l’occasion du FSM pour lancer la campagne « Peuples indigènes dans l’Amazonie – Présent et futur de l’humanité ». L’association « Service et Coopération avec le peuple Yanomami » (SECOYA) y a présenté ses activités. Son coordinateur général, Silvio Cavuscens, a collaboré activement aux activités de la délégation suisse au FSM. Il a conduit cinq de ses délégués dans les communautés Yanomami du rio Marauiá (et non pas l’ensemble de la délégation comme pouvait le laisser penser le dernier « AYA Info »).
* Voir AYA Info No 35
Pour avoir un aperçu en français du FSM, vu par la délégation suisse, lire les articles publiés par le quotidien helvétique « Le Courrier » : http://www.terrabrasilis.ch/informations/infofsm et http://www.e-changer.ch/. Sur la présence des indigènes au FSM et plusieurs des documents évoqués ci-dessus (en portugais et en espagnol) : http://www.coiab.com.br/
Un indien Ye’kuana tué par des garimpeiros
Un indien de la Communauté Ye’kuana de São Luiz do Arame, Luiz Vicente Carton, a été assassiné par des garimpeiros (orpailleurs) le 21 janvier dernier. Son fils, Ronildo Luiz Carton, qui l’accompagnait a été blessé à l’épaule et a pu s’échapper dans la forêt. Cette communauté est située sur la municipalité de Alto Alegre, dans la Terre Indigène (TI) Yanomami, dans l’État de Roraima. Selon les premières informations et témoignages diffusés au sujet de cet assassinat, Luiz Vincent travaillait depuis 1990 pour les garimpeiros, les guidant et faisant fonctionner les machines. Il avait tout récemment manifesté son intention de cesser cette activité. Il a été tué pour avoir refusé de conduire cinq garimpeiros dans une zone très difficile d’accès. Le 29 janvier, les chercheurs d’or impliqués dans cette agression se sont rendu à la Police fédérale de Boa Vista, la capitale de l’Etat de Roraima. Un membre de la police a déclaré au quotidien la « Folha de Boa Vista » que des entrepreneurs financent l’orpaillage illégal dans cet État, y compris dans la TI Yanomami. La Fondation Nationale de l’Indien (FUNAI) a fait savoir qu’elle avait envoyé un indigéniste sur place pour suivre les investigations. Le 25 janvier, des Yanomami de la région du Paapiu qui pêchaient dans le rio Couto de Magalhes ont rencontré d’autres garimpeiros. Avec l’association Hutukara Yanomami, ils se disent fatigués d’attendre le retrait de ces envahisseurs par la FUNAI et la Police fédérale. Ils menacent de réagir eux-mêmes par la force pour chasser les garimpeiros de la région. Le 28 janvier, l’association « Survival international » de Londres a envoyé une lettre au ministre brésilien de la justice pour lui faire part de sa préoccupation.
Raposa Serra do Sol, dans l’attente du jugement*
Déjà deux fois à l’ordre du jour du Tribunal Suprême Fédéral (STF), en août et décembre 2008, les membres de la plus haute juridiction du pays doivent encore se prononcer sur le recours contestant la validité du décret présidentiel d’avril 2005 homologuant la démarcation, en aire continue, de la Terre Indigène Raposa Serra do Sol (TI RSS) dans l’État de Roraima. La période des vacances arrivant à son terme et en prévision d’une probable reprise prochaine du jugement, les acteurs se manifestent. Dès le 21 janvier, quelques indiens opposés à cette forme de démarcation ont installé un campement sur l’une des places de Boa Vista. Entre le 28 et le 30 janvier, ils ont occupé le siège régional de la FUNAI. Ils ont réclamé des titres de transports pour se rendre à Brasilia rencontrer les membres du STF. De son côté, le 28 janvier, le président Lula a signé un décret transférant 60’000 km2 de terres appartenant à l’Union à l’État de Roraima. Ce dernier se plaint d’avoir une trop grande partie de son territoire occupé par les Terres Indigènes et les Unités de Conservation. Début février, le Conseil Indigène de Roraima (CIR) a publié une note dans laquelle il exprime sa préoccupation concernant les dix-huit restrictions formulées par l’un des juges du STF. Pour le CIR, certaines de ces restrictions, si elles étaient retenues dans le jugement final, porteraient gravement atteinte aux droits des indiens sur leurs terres. Plusieurs organes de presse ont annoncé récemment que le jugement devrait avoir lieu au cours du prochain mois de mars.
* Voir AYA Info No 31 et 34
Des Yanomami veulent protéger des lieux sacrés
Réalisées sans qu’ils aient donné leur avis, les Yanomami n’acceptent pas les constructions autorisées par l’Institut Chico Mendes de Conservation de la Biodiversité (ICMBio), sur le chemin qui permet l’accès au « Pico da Neblina » (le Pic du Brouillard). Cette montagne, la plus haute du Brésil (2’993 m), ainsi que le « Pico 31 de Março » (2’972 m) tout proche, sont dans un Parc national qui se superpose avec la TI Yanomami dans l’État d’Amazonas, à la frontière avec le Venezuela. Au début janvier, les indiens ont démonté un abri construit sur un lieu sacré. Ils se plaignent également des ordures laissées par l’armée sur les lieux de chasse et de pêche.
Pour en savoir plus (en portugais) : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2837
La réunion du Conseil du District sanitaire Yanomami
Les membres du Conseil du District Sanitaire Yanomami et Ye’kuana (DSY) se sont réunis du 16 au 18 février à Alto Alegre, une localité située à 30 km de Boa Vista. Cette réunion a été l’occasion, pour la cinquantaine de conseillers présents, d’exprimer leur préoccupation quant au mauvais fonctionnement du service de santé dans la TI Yanomami. Ils ont évoqué les retards de la Fondation Nationale de la Santé (FUNASA) dans le versement des ressources financières aux deux associations avec lesquelles la Fondation a signé une convention pour assurer le service de santé dans leurs communautés : le Diocèse de Roraima et la SECOYA. Cela entraîne une discontinuité du travail. Ils se plaignent du manque de médicaments et d’équipements. Ces plaintes sont récurrentes. Ils s’inquiètent également de l’arrivée à échéance, en mai prochain, de la convention passée entre la SECOYA et la FUNASA. Ils sont encore préoccupés par l’absence d’information au sujet de la mise en place, par le gouvernement, d’une nouvelle entité chargée de la santé indigène dont serait déchargée la FUNASA*. Le coordinateur de la SECOYA, Silvio Cavuscens, a expliqué comment, faute de moyens, les relevés épidémiologiques et leur systématisation n’ont pas été réalisés. Le Coordinateur régional de la FUNASA de Boa Vista était présent à la réunion. Le District sanitaire Indigène (DSEI) est l’une des composantes du système de santé indigène au Brésil. Il y en a 34 dans tout le pays. Dans chaque district, un Conseil est chargé d’approuver le programme de travail et d’en accompagner la réalisation. Il est composé de représentants désignés par les communautés.
*Voir AYA Info No 32
Pour en savoir plus sur la réunion (en portugais) : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2846,
Sur le système de santé indigène (en portugais) : http://www.funasa.gov.br/internet/index.asp > Saúde indígena.

Bernard Comoli avec l’aide de Silvio Cavuscens et Pascal Angst

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