Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 37 Genève, le 28 mars 2009

L’OIT questionne le gouvernement brésilien. La déforestation de l’Amazonie. La 38e Assemblée générale des Peuples indigènes de Roraima. Raposa Serra do Sol, une victoire patiemment attendue.

 

"AYA Info" peut être consulté sur les sites Internet :
 
L’OIT questionne le gouvernement brésilien
La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR) de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) s’est réunie pour sa 79e session du 27 novembre au 12 décembre 2008. Elle a examiné les documents envoyés par trois organisations syndicales brésiliennes en août – septembre 2008, au sujet de l’application de la Convention 169 qui protège les peuples indigènes et tribaux*. Dans son rapport diffusé récemment, la Commission demande au gouvernement de lui fournir des informations sur les mécanismes de consultation et de participation des peuples indigènes en général. Mais aussi dans des cas plus spécifiques. Par exemple, dans le domaine législatif, sur le projet de loi relatif à l’exploitation minière dans les Terres indigènes; le processus de régularisation des Terres indigènes et territoires Quilombolas (Terres des communautés composées de descendants des esclaves fugitifs), qui n’a pas été conduit à son terme; la construction de barrages dans les Terres indigènes, ou la transposition du Rio São Francisco. La CEACR demande aussi des explications au sujet des conditions de vie des communautés quilombolas de l’Alcântara, dans l’État du Maranhão, concernées par l’agrandissement du Centre spatial du même nom. La Commission attend une réponse du gouvernement brésilien en 2009 déjà.
* Voir AYA Info No 31
Pour en savoir plus sur la demande de la CEACR (en français) :
http://webfusion.ilo.org/public/db/standards/normes/appl/index.cfm?lang=FR > par pays (en jaune au centre de la barre d’outils) > Brésil (dans la colonne de gauche), aller à C. 169 et cliquer sur "observation"
 
La déforestation de l’Amazonie
La presse a largement rendu compte du contenu du rapport sur l’Amazonie publié le 18 février à Nairobi (Kenya), par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) et l’Organisation du Traité de Coopération Amazonienne (OTCA). Il s’agit d’un important document de 323 pages, rédigé par de nombreux scientifiques et chercheurs, qui rappelle ce qu’est l’Amazonie et comment elle est victime du développement économique. En 2005, le plus vaste massif forestier de la planète qui s’étend sur huit pays (Bolivie, Brésil, Colombie, Equateur, Guyana, Pérou, Surinam et Venezuela), a perdu 857’666 km2, soit 17 % de sa superficie initiale. Une grande partie, 682’124 km2 ou 79,5 %, de la déforestation a eu lieu au Brésil. Dans les années 80, le rythme annuel de la déforestation était en moyenne de 23’619 km2. Cette moyenne est revenue à 20’550 km2 dans les années 90, pour repasser à 27’218 km2 entre 2000 et 2005. Pour les auteurs, la déforestation a des causes multiples, parmi lesquelles la pression démographique, l’élevage, la monoculture, l’exploitation minière et forestière, mais aussi la construction d’infrastructures : routes, barrages, et lignes électriques. La dégradation toujours plus intense de l’écosystème amazonien a de nombreux impacts, par exemple, pour la population, il élève le risque d’exposition aux maladies; il génère des conflits sociaux. Il est aussi à l’origine d’une perte de la biodiversité et de changements climatiques locaux. L’étude publiée par les deux organismes gouvernementaux passe en revue quatre scénarios pour l’avenir et propose des lignes d’action dont l’axe est le développement soutenable de la région. Rappelons ici, qu’à l’automne 2007, une dizaine d’ONGs brésiliennes avaient présenté un "Pacte pour la valorisation de la forêt et la fin de la déforestation" en Amazonie brésilienne*. Le 24 mars dernier, le ministère brésilien de l’environnement a rendu publique, une liste d’une quarantaine de municipalités amazoniennes sur lesquelles la déforestation a été égale ou supérieure à 200 km2 en 2008. De son côté, l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), vient de publier un rapport sur la situation des forêts dans le monde. Le document montre que les forêts tropicales (dont l’Amazonie) ont une plus grande capacité de séquestration du CO2 que les forêts tempérées.
Pour en savoir plus :
Document du PNUE et de l’OTCA (22,2 Mo, 323 pages), en anglais, espagnol et portugais : http://www.pnuma.org/deat1/geoamazonia/
* Voir "AYA Info" No 16 et, en portugais : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2534
La liste des municipalités "championnes" de la déforestation (en portugais) :
Le rapport de la FAO "Situation des forêts du monde 2009", en français (13,4 Mb 169 pages) :
 
38e Assemblée générale des Peuples indigènes de Roraima
Du 6 au 9 mars, 687 représentants de 286 communautés et organisations indigènes se sont réunis à l’appel du Conseil Indigène de Roraima (CIR), dans la communauté indigène du Barro, sur la Terre Indigène Raposa Serra do Sol, à 230 Km de Boa Vista, la capitale de l’État de Roraima. Ils ont tenu la 38e Assemblée générale des Peuples Indigènes de Roraima. Plusieurs entités, administrations publiques et organisations indigénistes étaient également présentes. Ainsi, la Fondation Nationale de l’Indien (FUNAI), était représentée par son président Márcio Meira. Davi Kopenawa représentant de Hutukara Associação Yanomami (HAY) a dénoncé, une fois de plus, la présence de garimpeiros et de fazendeiros dans la Terre Indigène Yanomami. Le document final, adopté par les participants, rappelle leurs préoccupations. On y trouve une cinquantaine de revendications et propositions dans cinq domaines : la démarcation des Terres et territoires indigènes, l’environnement, la santé, l’éducation indigène différenciée et le développement soutenable. Dionito José de Souza, le coordinateur du CIR a été réélu pour un nouveau mandat de quatre ans.
 
Raposa Serra do Sol, une victoire patiemment attendue*
Le 19 mars, c’est par dix voix contre une que le Tribunal Suprême Fédéral (STF) a reconnu la validité du processus de démarcation de la Terre Indigène Raposa Serra do Sol (17’000 km2), située dans l’État de Roraima et habitée par 19’000 indigènes. Cette décision a eu un écho international. Cette démarcation avait été homologuée par décret présidentiel en avril 2005. Les juges ont également décidé le retrait rapide des fazendeiros qui ont occupé illégalement cette Terre. Le délai pour leur évacuation est fixé au 30 avril. Pour le Conseil Indigène de Roraima (CIR), "Reconnaître cette démarcation en aire continue de Raposa Serra do Sol, c’est garantir la vie physique et culturelle des peuples Macuxi, Wapichana, Ingarikó, Taurepang et Patamona, habitants ancestraux du nord du Brésil"…. "Avec la conclusion du jugement et le retrait des occupants illégaux, le CIR croit que les communautés vivront en paix et pourront construire un futur de développement soutenable en harmonie avec la nature". Le CIR remercie tous ceux qui ont appuyé leur lutte qui aboutit à cette décision attendue depuis plus de trente ans. Le STF a assorti son jugement de dix-neuf conditions applicables à la démarcation des autres Terres indigènes du pays, conditions qui n’ont pas été discutées par les juges. Certaines d’ente-elles sont un simple rappel de ce que prévoit la Constitution, mais d’autres inquiètent, comme celle qui empêche l’extension de la surface des terres déjà démarquées. Avant même le jugement, le Procureur Général de la République a fait remarquer au STF que certaines de ces conditions étaient contraires aux dispositions de la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail ratifiée par le Brésil. Pour l’Institut Socioambiental (ISA) "Le STF donne d’une main et reprend de l’autre". Pour le vice-président du Conseil Indigéniste Missionnaire (CIMI), plusieurs de ces conditions favorisent tous les groupes qui exploitent, ou désirent exploiter, les richesses des terres indigènes, ou encore, rendront plus difficiles les futures démarcations.
*Voir "AYA Info" Nos 31, 34 et 36.
Pour en savoir plus (en portugais) :
Sur l’avis du Procureur Général de la République (en portugais) :
Avis de l’ISA (en portugais) : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2859
Avis du CIMI (en portugais) :
 
Bernard Comoli avec l’aide de Sélim Benaïssa

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