Belo Monte : le Brésil ne respecte pas la Convention 169 de l’OIT / Convention 169, le gouvernement organise un séminaire / Une présidente à la tête de la FUNAI ? / De retour de Genève Davi Kopenawa participe à la 41e Assemblée des peuples de Roraima / Comme des sénateurs, des députés veulent contrôler la démarcation des Terres indigènes / La politique environnementale de l’État d’Amazonas provoque le mécontentement.
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Belo Monte : le Brésil ne respecte pas la Convention 169 de l’OIT
« D’après la documentation et les informations transmises par le gouvernement, la commission estime que, dans le cadre des procédures menées à ce jour, malgré leur caractère étendu, les conditions prévues aux articles 6 et 15 de la convention, telles qu’elles sont décrites plus haut, ne sont pas remplies, et que les peuples autochtones n’ont pas pu participer de manière effective à la détermination de leurs priorités, conformément à l’article 7 de la convention ». La commission prie le gouvernement de : i) prendre les mesures nécessaires pour consulter les peuples autochtones concernés sur la construction de l’usine hydroélectrique de Belo Monte, celle-ci risquant d’avoir des effets irréversibles (articles 6 et 15 de la convention) : ii) en consultation avec les peuples autochtones, prendre les mesures pour déterminer si les priorités de ces peuples ont été respectées et déterminer si et dans quelle mesure leurs intérêts seront menacés afin d’adopter les mesures d’atténuation nécessaires et de prévoir l’indemnisation voulue; et iii) transmettre les informations sur les résultats des procédures en cours devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme et devant le tribunal fédéral de Pará ». Telle est la conclusion du Rapport de la Commission* d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’Organisation Internationale du Travail – OIT au sujet de Belo Monte publié ce début mars. La Fondation Nationale de l’Indien – FUNAI qui avait donné son aval à la construction de l’ouvrage en octobre 2009.
*Attention, c’est un document de 13,9 Mo, voir les pages 1045 à 1050, numérotées de 1028 à 1033.
Convention 169, le gouvernement organise un séminaire
Les organisations indigènes ont maintes fois reproché au gouvernement brésilien de ne pas respecter la Convention 169 de l’OIT. Le cas de Belo Monte (voir ci-dessus) montre que le reproche est justifié. En septembre 2011, James Anaya, le rapporteur spécial des Nations Unies pour les droits des peuples autochtones avait participé à un séminaire organisé par la FUNAI sur le processus de consultation préalable voulu par la convention. À fin janvier, un Arrêté du Secrétariat général de la présidence de la république a créé un groupe de travail pour étudier, évaluer et présenter des propositions de réglementation de ce processus. Les 8 et 9 mars, le Secrétariat et le Ministère des affaires étrangères ont organisé un séminaire « Convention 169 de l’OIT, expériences et perspectives » auquel ont participé environ 160 dirigeants indigènes, quilombolas et de communautés traditionnelles. Un « Atelier préparatoire » avait été réalisé à la fin février. Au cours de cette réunion préparatoire, l’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB a rédigé un texte résumant un certain nombre de considérations et revendications. Parmi celles-ci, la constitution d’un Groupe de travail, constitué de leaders indigènes désignés par l’Articulation, pour assurer la participation aux travaux d’élaboration des mécanismes de consultation. Le programme du séminaire fait état de la participation de James Anaya et Birgitte Feiring de l’OIT. Les conclusions de la rencontre n’ont pas été publiées. Pour en savoir plus en français : « AYA Info » Nos 64 et 65
Une présidente à la tête de la FUNAI ?
Depuis quelques semaines, il a été fait état d’un probable changement à la présidence de la FUNAI. Le titulaire de la charge, Márcio Meira, aurait manifesté le désir de quitter cette fonction après cinq ans passés à la tête de la Fondation créée en décembre 1967. Il en a été le 32e président. Ces jours-ci la presse annonce que Dilma Rousseff avait choisi, pour lui succéder, la démographe Marta do Amaral Azevedo qui serait nommée avant la fin du mois. Ce serait la première fois qu’une femme est nommée à ce poste. Le 9 mars, l’APIB a adressé une « Lettre ouverte » à la présidente de la république et à la société brésilienne dans laquelle elle exprime son indignation pour avoir été tenue à l’écart de cette décision, alors que ses membres participaient au séminaire sur le mécanisme à mettre en place pour la consultation préalable, libre et informée prévue par la Convention 169 de l’OIT. Pour l’articulation, cette désignation sans consultation est une violation de cette convention : « le gouvernement perd une opportunité de démontrer dans la pratique que son discours est cohérent avec sa pratique ». L’APIB reproche à Márcio Meira d’avoir eu recours à des entités non gouvernementales pour la gestion de la FUNAI : « Nous ne voulons pas et n’allons pas permettre que continue une politique indigéniste qui sous-estime notre savoir et notre capacité à comprendre le cadre dans lequel s’inscrit le futur de nos peuples et territoires… Le gouvernement fédéral doit reconnaître et avoir les peuples et organisations indigènes comme alliés pour la pleine garantie des droits indigènes de notre pays ». Elle affirme sa ferme détermination de lutter pour le respect des droits inscrits dans la constitution fédérale et dans les instruments internationaux. Elle demande au gouvernement qu’il reconnaisse les peuples et organisations indigènes comme partenaires prioritaires dans la conduite de la politique indigéniste. Deux organisations indigènes affirment ne pas avoir été consultées sur cette position prise par l’APIB.
De retour de Genève Davi Kopenawa participe à la 41e Assemblée des peuples de Roraima
Comme annoncé dans le dernier AYA Info, Davi Kopenawa était de passage à Genève ce début mars invité par l’Organisation Mondiale de lutte contre la Torture – OMCT dans le cadre de son programme de « Défense des défenseurs des droits humains ». Il a répété son appel à la protection de la forêt et de l’environnement au niveau planétaire à l’occasion du débat qui a suivi la projection du film « Indiens en sursis » de Daniel Schweizer; film inscrit au programme du Festival du film et forum International sur les Droits Humains – FIFDH. Il a également rencontré les membres de plusieurs services et organismes des Nations Unies en lien avec les droits humains et ceux des peuples autochtones. À son retour au Brésil, Davi a participé à la 41e Assemblée des peuples indigènes du Roraima organisée par le Conseil Indigène du Roraima – CIR. À cette occasion, le 12 mars, il a remis à Paulo Maldos, un représentant de la présidence de la république, une lettre destinée à la présidente Dilma Rousseff. Il lui demande « de prendre des mesures pour retirer les garimpeiros qui envahissent la Terre Indigène Yanomami de punir les organisateurs et bénéficiaires de cette activité criminelle qui lèse les peuples indigènes ». Il demande la mise en place d’un programme permanent de surveillance territorial et de promotion du bien être et du bien vivre. Entre les 18 et 21 mars, cinq sites d’orpaillage ont été détruits par les forces de l’ordre dans la TI Yanomami. Le document final adopté par l’Assemblée, adressé à Dilma Rousseff et aux membres du gouvernement, aborde les préoccupations des peuples indigènes de la région : droits territoriaux, violences, santé, éducation. Ceux-ci demandent l’application de mesures efficaces de la part des organes fédéraux chargés de l’application de la Constitution.
Pour en savoir plus, pour voir le débat (49’50 ») partiellement en français, cliquer > ici > Les populations autochtones en sursis.
Comme des sénateurs, des députés veulent contrôler la démarcation des Terres indigènes
Les dispositions constitutionnelles relatives à la protection des Terres indigènes viennent de faire l’objet d’une nouvelle attaque de la part des députés partisans de l’agrobusiness. En novembre 2011, des parlementaires membres de la Commission « Constitution, Justice et Citoyenneté » de la Chambre des députés ont demandé la mise en votation d’une proposition d’amendement constitutionnel (PEC 215/2000), formulée le 28 mars 2000 par Almir Sá, un député du Roraima. Cette proposition vise à transférer au Congrès national la compétence de l’approbation de la démarcation des terres indigènes et la ratification des démarcations déjà homologuées. Malgré les protestations des organisations indigènes, le 21 mars, la Commission a approuvé cette proposition par 38 voix contre 2. Le texte doit maintenant suivre la procédure parlementaire. Une proposition allant dans le même sens est pendante au Sénat (Voir « AYA Info » No 68).
La politique environnementale de l’État d’Amazonas provoque le mécontentement
Le 21 mars, une vingtaine d’associations de l’État d’Amazonas, parmi elles le « Service et Coopération avec le Peuple Yanomami » – SECOYA* et la Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne – COIAB, ont publié un manifeste exprimant leurs inquiétudes en ce qui concerne la politique socio -environnementale de cet État du Brésil. Le document énumère différents domaines touchés par la dégradation de la situation : Unités de conservation, le processus de régularisation foncière, déforestation, etc. Les organisations signataires appellent les pouvoirs publics, la société civile et ses organisations à se mobiliser pour résoudre ces problèmes et garder l’espoir d’un avenir meilleur pour la vie en Amazonie.
* SECOYA est le partenaire de AYA.
Bernard Comoli
PS : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
AYA – Appui aux indiens Yanomami d’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2