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L\’ambassade de Suisse appuie le programme d\’éducation en santé de la Secoya
Le programme d\’éducation en santé mis sur pied par le Service et Coopération avec le peuple Yanomami – SECOYA* de Manaus a reçu l\’appui de l\’ambassade de Suisse à Brasilia. Les bénéficiaires directs du projet sont les 350 enfants, de 0 à 5 ans, des villages yanomami du rio Marauiá** et des ses affluents. Le projet, prévu pour durer 12 mois, doit commencer ce prochain mois de juin. L\’objectif est de diminuer de moitié, en trois ans, le taux de dénutrition infantile qui est actuellement de 44%. Pour atteindre ce résultat, la Secoya a prévu d\’organiser d\’abord deux cours de dix jours destinés à 25 Agents Indigènes de Santé – AIS. Ces cours porteront sur la valorisation des aliments traditionnels susceptibles d\’améliorer l\’équilibre nutritionnel des enfants. Il s\’agit de réduire les facteurs à l\’origine de la perte de poids, notamment les maladies diarrhéiques, les infections respiratoires, les parasitoses… Parallèlement aux cours, d\’autres actions de prévention sont prévues dans les villages : activités pratiques de purification de l\’eau de consommation, hygiène personnelle et de l\’habitation, élimination des ordures, etc. Pour assurer la viabilité et la durabilité de ces actions sur le long terme, la Secoya veut progressivement confier la responsabilité de ces actions à des agents multiplicateurs. Ceux-ci agiront pour favoriser des changements sociaux tout en étant de défenseurs de la culture traditionnelle des Yanomami.
* Le partenaire de AYA
** Une rivière située dans la partie de l\’État d\’Amazonas de la Terre Indigène Yanomami
Droits territoriaux des indigènes : des heurts à Brasilia
À Brasilia, dans l\’après-midi du 27 mai, les forces de l\’ordre ont violemment bloqué le cortège composé d\’indigènes, de membres du « Mouvement des Travailleurs Sans Toit »- MTST et du « Comité populaire de la Coupe » de Brasilia qui se dirigeait vers le stade de la capitale fédérale où, ce jour-là, était exposée la coupe du prochain mondial de football. Le Comité populaire avait organisé un « Tribunal » pour juger les violations et crimes de la Coupe commis par la FIFA, les gouvernements Fédéral et du District fédéral.
À l\’appel de l\’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB, plusieurs centaines de leaders représentant les peuples et organisations indigènes de tout le Brésil, sont réunis à Brasilia entre le 26 et le 29 mai pour la défense de leurs droits territoriaux*.
Le 27 mai, une délégation s\’est rendue au siège du Tribunal Suprême Fédéral – STF pour demander à celui-ci d\’examiner le cas de deux députés fédéraux – Luiz Carlos Heinze et Alceu Moreira – auteurs de propos racistes. Le 28 mai une délégation de leaders a rencontré le président de la Chambre des députés Henrique Eduardo Alves. Il a affirmé que la Proposition d\’amendement constitutionnel (PEC 215) qui veut transférer au parlement la responsabilité de démarquer les Terres indigènes, tâche jusque-là relevant du gouvernement fédéral, ne serait adoptée que si elle fait l\’unanimité de la Chambre. Le 29 mai au matin, les indigènes ont bloqué l\’entrée du Ministère de la justice pour protester contre la paralysie de toutes les procédures de démarcation des terres indigènes dans tout le pays. Ils ont demandé une audience au ministre José Eduardo Cadozo, rencontre qu\’ils ont obtenue hier en fin d\’après midi. Ils lui ont remis une lettre exposant leurs différentes demandes. Selon « Agência Brasil » les leaders indigènes sont sortis insatisfaits de la rencontre.
En fait, cette mobilisation a commencé en avril 2013 quand la Chambre des députés avait été occupée quelques instants. Il y a eu également les nombreuses manifestations qui ont marqué le 25e anniversaire de l\’adoption de la Constitution de 1988 fin septembre – début octobre 2013.
Les indigènes veulent empêcher l\’approbation d\’une série de textes, projets de lois, arrêtés et projets d\’amendements constitutionnels qui tendent à réduire leurs droits territoriaux. Ils protestent également contre la construction et projets de construction d\’infrastructures (barrages, routes, etc.), et les nombreuses demandes de recherche et d\’exploitation minière sur les Terres indigènes. Celles qui sont reconnues et celles qui devraient l\’être.
Les peuples indigènes du Brésil font face à nouvelle vague de colonisation intérieure qui met en cause leur existence. La mobilisation a laquelle on assiste actuellement traduit leur volonté de résistance.
« Dom Tomás Balduino a fait sa Pâque »
C\’est ainsi que la Commission Pastorale de la Terre – CPT* a annoncé le décès de son fondateur survenu dans la ville brésilienne de Goiânia au soir du 2 mai. Dom Tomás Balduino, souvent appelé l\’évêque des Indiens et des Sans-terre était âgé de 91 ans. Il appartenait à l\’Ordre des Dominicains. Il avait été ordonné prêtre en 1948 et consacré évêque en 1967. Il a été à la tête du diocèse brésilien de Goiás pendant 31 ans jusqu\’à sa retraite en 1999. Ayant fait une partie de ses études en France, il s\’exprimait aisément en français.
Il a eu à connaître la difficile réalité vécue par les indigènes à partir de 1957 quand il a été nommé supérieur de la mission des Dominicains de la prélature de Conceição do Araguaia dans l\’État du Pará. À cette époque, cette mission accompagnait sept groupes indigènes, parmi eux, les Xikrin dont il apprit la langue. Afin de mieux connaître les peuples indigènes, il a étudié l\’anthropologie et linguistique. Pour faciliter la desserte de l\’immense territoire dont il avait la charge, Dom Tomás a appris à piloter les avions.
En 1972, il était du groupe de religieux à l\’origine de la création du Conseil Indigéniste Missionnaire – CIMI.* Il en a été le deuxième président entre 1980 et 1984. En 1975, il a également été l\’un des fondateurs de la CPT dont il a été le président entre 1999 et 2005. Les deux entités ont vu le jour pendant la dictature militaire. Elles publient régulièrement des rapports sur la violence faite aux peuples indigènes et sur celle qui sévit dans la campagne brésilienne contre les petits agriculteurs.
Encore récemment, le 12 mars dernier, Dom Tomás été auditionné par la Commission Nationale de Vérité qui enquête sur les exactions commises par les militaires pendant la dictature : »Le Coup [d\’État] a été fait par des stratèges. Ils n\’étaient pas des bouffons. Ils ont attaqués des points névralgiques. En premier ils ont attaqués des travailleurs, mais aussi des leaders dans les Églises… » C\’est certainement la dernière fois que l\’évêque s\’est exprimé publiquement au sujet de la dictature.
Dom Tomás était aussi connu à l\’extérieur du Brésil. Il était venu en Suisse en octobre 2005 à l\’invitation de Multiwatch, un collectif d\’associations helvétiques qui s\’intéressait alors à la politique de Nestlé en Colombie. En mai 2008, il était à Genève pour parler de la transposition du rio São Francisco. Une rencontre organisée par la Commission Tiers-Monde de l\’Eglise Catholique – COTMEC.
Plusieurs entités ont rendu hommage à cet évêque hors du commun. Ainsi, la Fondation Nationale de l\’Indien – FUNAI a rappelé que Dom Balduino « S\’est engagé fidèlement dans la lutte en faveur des Peuples Indigènes. Il a consacré sa vie à la construction d\’une société juste et démocratique, militant sur le terrain des grandes causes humaines et sociales. Il a agi inlassablement pour la défense des doits des populations exclues, des pauvres, des travailleurs sans terre et des indigènes »… « La trajectoire de Dom Tomás laisse au pays un vaste héritage d\’enseignements. Que son exemple de générosité et de ténacité reste vif en nous. Qu\’il soit capable de conquérir beaucoup d\’esprits et de cœurs. Qu\’il puisse rallumer chaque jour notre courage de lutter et d\’agir pour une société juste, fraternelle et solidaire ».
Une partie des célébrations funèbres ont eu lieu à Goiânia, la capitale de l\’État brésilien de Goiás. La sépulture a eu lieu le 5 mai à 140 km de là, dans la cathédrale de la cité de Goiás. Ce sont des indiens qui ont alors porté le cercueil dans l\’édifice. Une quarantaine d\’entre eux, représentant une demi-douzaine d\’ethnies ont réalisé un rituel conforme à leurs coutumes. Ils ont décoré le visage de Dom Tomás avec de l\’urucum et placé une coiffe indigène à la tête du cercueil. Deux d\’entre eux ont rendu hommage à Dom Tomás. Gercília Krahô a souligné son caractère : « Il aimait les personnes, il les respectait. Non seulement il nous défendait, mais il défendait aussi les paysans, les riverains, les quilombolas et les pêcheurs… » Et Antônio Apinajé a rappelé sa fidélité à la cause indigène : « Nous lui serons éternellement reconnaissants parce qu\’il a toujours été avec nous dans nos luttes pour la défense de nos territoires. Il était avec nous dans la joie et dans la tristesse, dans la santé et dans la maladie, dans nos fêtes et dans nos luttes ».
L\’une des caractéristiques de l\’engagement de Dom Tomás Balduino est d\’avoir contribué à la mise en place d\’institutions comme la CPT et le CIMI qui donnent une dimension collective et pérenne à ses convictions profondes. Cet héritage est particulièrement précieux en ce moment où les Peuples indigènes du Brésil vivent une période difficile de leur histoire. Leurs droits constitutionnels sont remis en cause.
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* La CPT et le CIMI sont des entités liées à la Conférence Nationale des Evêques du Brésil – CNBB
Bernard Comoli
Important : L\’activation des liens hypertextes renvoie aux sources utilisées pour la rédaction de ce bulletin. Elles sont souvent en portugais, sauf quand il s\’agit d\’anciens « AYA Info ».
PS : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et parfois illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l\’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
AYA – Appui aux indiens Yanomami d\’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2