Le 17 janvier dernier, M. Walter Fust, directeur de la DDC, a invité les ONGs au bénéfice d’une contribution de programme, dont la FGC, à une rencontre durant laquelle il leur a fait part des enjeux majeurs, à ses yeux, de la politique du développement tant à l’international qu’en Suisse.
Au niveau international, c’est évidemment l’arrivée de nouveaux acteurs de la géopolitique qui retient l’attention : la Chine, l’Inde, le Brésil, Singapour, l’Afrique du Sud, la Corée du Sud, entre autres, acquièrent un poids économique et politique majeur. Dans le mouvement, ces pays développent leurs propres relations avec les pays les plus pauvres de la planète. Cette nouvelle donne oblige à réfléchir sur deux points au moins. D’une part, la dichotomie classique entre LE Nord et LE Sud en devient simpliste : il y a maintenant LES Suds et LES Nords, tous traversés par des inégalités, donc de nouveaux acteurs, de nouveaux partenaires, de nouveaux enjeux. D’autre part, selon M. Fust, ces nouveaux acteurs ont tendance à agir « à l’ancienne » dans le domaine du développement, comme le faisaient naguère les pays industrialisés, ce qui risque d’entraîner un retour en arrière dans les conceptions et les pratiques de l’aide publique au développement. Cela donne du « grain à moudre » pour la réflexion des ONGs.
Au niveau national, M. Fust décrit un climat politique lourd. Pour certains (suivez mon regard), la suppression ou le rabotage de l’aide publique au développement est à l’ordre du jour. Pour d’autres, c’est une « mise au pas » des ONGs qui s’impose : celles qui bénéficient de contributions de programmes devraient être les « agents d’exécution » des décisions du gouvernement. D’autres encore se demandent si on a encore besoin des ONGs suisses et si on ne peut pas traiter directement avec les partenaires du Sud. Dans ce contexte, le rôle des ONG est fondamental pour « défendre et illustrer » dans la société civile à la fois l’aide publique au développement et le travail associatif qui y contribue. D’une part, il faut des sous pour atteindre, entre autres, les fameux « objectifs du millénaire » ; d’autre part, cet engagement solidaire de la Suisse doit être porté par la population si on veut qu’il dure.
Il faut donc convaincre les politiques et la population de la validité de la coopération suisse. Pour ce faire, dit M. Fust, il ne suffit pas de « prêcher » la solidarité comme de bons missionnaires. Il faut répondre (calmement) aux attaques, sensibiliser l’opinion, faire réfléchir par des faits et des arguments : donner à voir ce que l’on fait, ne pas se dérober au débat, démonter que si le monde change, on n’y fera pas face par la voie solitaire mais tous ensemble. En particulier, il appartient aux ONGs de faire prendre conscience au public que les « résultats » de la coopération ne sont pas ses effets immédiats (« output » en anglais), mais son impact à moyen et long terme (« outcome en anglais) : ce qui compte, c’est moins le nombre de femmes qui se sont formées grâce à tel projet que ce qu’elles ont pu faire de cette formation (les capacités à agir que cela a développé chez elles).
En ce sens, la future campagne « 0,7% » qui sera lancée le 07.07.07 par une coalition d’ONGs tombe à pic. Ce sera l’occasion pour celles-ci, donc pour nous, de convaincre et de faire réfléchir un maximum de citoyennes et citoyens de ce pays.
Jean-Marc Denervaud