Réimmersion dans le quotidien de l’UNIÃO

Les projets du crédits solidaire
Paripe : la solidarité est aussi une valeur qui se construit…

En mai 2008, nous avons eu la grande joie d’accueillir les SIME (Sélim, Isabelle, Manon et Eliot), amis de longue date. Ce fut trois semaines de bonheur intense et une opportunité pour Tiago d’être au quotidien avec d’autres enfants, ce qu’il a drôlement apprécié. L’occasion aussi pour eux de découvrir de plus près notre quotidien. Vu leur grand intérêt et leur désir d’en savoir davantage, il allait de soit que les SIME ne pouvaient pas retourner en suisse sans rencontrer nos collègues et  découvrir notre terrain de travail. Nous sommes donc, entre autre, aller visiter le projet du crédit solidaire de Paripe, où Matilde et César de l’équipe de gestion ainsi que plusieurs mutirantes ont pu présenter leur futur quartier et raconter comment s’organise leur travail, quels sont leurs rêves par rapport à cette nouvelle communauté. En résumé, ce fut une brève petite rencontre entre deux mondes qui cherchent tous deux à tendre vers une société plus équitable, espérons que ces petits ponts Sud-Nord comme  Nord-Sud soient suffisamment solides et qu’il en restera une trace dans le futur.
 
Puis, nos deux mois absents du Brésil, nous ont permis de réaliser les avancées concrètes en termes de travaux, du projet solidaire de Paripe. Il est vrai qu’au jour le jour avec peu de recul, le chantier paraît interminable. Face à cette montagne, le mutirão semble vivre des moments de découragement, mais  malgré le peu de familles sur place pour prêter main forte, l’œuvre entame sa quatrième étape. Une vingtaine de personnes très motivées se réunissent tous les week-end pour faire avancer les travaux du mieux qu’ils peuvent. Présent depuis le début du cheminement, la petite « galera » (groupe) essentiellement constituée de femmes, s’entraide et s’encourage pour continuer. Le cœur du mutirão de la future communauté est né.
Dans la journée du dimanche 24 août, plus de 60 personnes d’autres futurs projets du Crédit Solidaire dans la Bahia sont venues pour donner un coup de main mais également afin de tirer les enseignements de cette première œuvre de l’UMP/BA. Cette journée de troc s’est terminée avec une magnifique feijoada pour redonner un peu de force à chacun.
 
Comme tout grand projet, il y a des hauts et des bas, le projet du crédit solidaire de Paripe ne peut malheureusement  pas échapper à la règle. Pour finir les travaux dans les délais prévus et pour éviter l’augmentation des frais, une petite vingtaine de mutirantes sur 236 familles et encore de l’aide sporadique comme la journée de troc avec les autres futur mutirão, ne sont de loin pas suffisant. En dehors du fait qu’il est absolument injuste que certains participent et que d’autres pas, actuellement la vie même du projet en est en jeu. Malgré les efforts de l’équipe sociale, la participation dans le mutirão reste faible et très fragile. Devant ce constat, la commission de gestion avec l’équipe sociale a décidé d’envoyer un courrier à chaque titulaire de contrat rappelant qu’ils se sont engagés à participer au minimum à 16 heures hebdomadaires. Après 7 mois de chantier et une œuvre qui semble paralysée, il est question d’envisager la substitution des familles qui ne jouent pas le jeu.
A ce point, une assemblée générale est fixée le 27 septembre pour définir l’avenir du projet avec une affluence record – on l’espère.
Depuis que nous sommes rentrés, nous tentons d’appuyer l’équipe de gestion pour aller de l’avant et ne pas se laisser prendre par le découragement. Nous essayons de relancer les réunions d’organisation entre toutes les commissions et avons terminé la base de données des adresses de tous les mutirantes du projet, cela semble peu, mais on peut vous assurer que c’est un vrai casse-tête chinois et que nous sommes très heureux d’y voir enfin le bout, ouf, une bonne chose de faite !
A noter encore que grâce à la vente en suisse des t-shirt de l’UNIÃO, nous avons pu envoyer le courrier à toutes les familles du projet. L’état des finances de l’œuvre et de l’UNIAO étant ce qu’il est, cette solution de secours a permis de faire un petit pas de plus. Dans l’idéal, la somme de 350 frs récoltée grâce à vous, devrait être utilisée pour l’achat de matériel concret pour les activités sociales des deux projets : Paripe et Estrade Velha, afin de donner un petit coup de pouce.
Estrada Velha do Aeroporto : un projet sous le signe de l’environnement et du développement durable…
Après de nombreuses négociations avec la cellule de médiation du Secrétariat pour le Développement Urbain de la Bahia, l’UNIÃO et le propriétaire du terrain d’Estrada Velha do Aeroporto, Sr. Dionisio, ont finalement trouvé un accord pour la vente définitive du terrain. Depuis le mois d’août, les bénéficiaires du projet se réunissent pour mettre à jour toute la documentation nécessaire afin que les contrats liés au programme du Crédit Solidaire soient octroyés par la Caixa Econômica Federal dans un délai record.
 
Mira, coordinatrice de l’UMP-BA et leader de la communauté de Santa Rosa de Lima, a repris en main le dossier, appuyée par la coordination de l’UNIÃO. La construction à proprement parler devrait commencer cette année encore – au mois d’octobre selon les prévisions de l’équipe d’organisation.
 
L’occupation qui, jusque-là,  avait permis de mettre la pression sur l’actuel propriétaire est donc sur le point d’être démantelée. Certaines familles ont déjà été relogées dans d’autres projets du Mouvement Sans Toit de Salvador (MSTS – mouvement partenaire de l’UNIÃO) ou seront déplacées dans de nouvelles occupations. En effet, ce ne sont pas moins de 1000 familles qui se sont d’ores et déjà inscrites dans ce projet prévu pour seulement 312. Certaines ne répondent pas aux critères de la Caixa Econômica Federal qui exige un salaire familial d’au minimum 415 reais (environ 300.-CHF) et au maximum 1660 selon la taille de la famille. A noter, dès le début de l’occupation un gros travail d’information a été fourni auprès des occupants afin qu’ils prennent conscience que cette occupation ne pouvait être que temporaire et qu’elle servait d’appui au projet de l’UNIÃO où des familles étaient déjà inscrites. L’UNIÃO est sans aucun doute redevable envers le MSTS qui a bien voulu prêter main forte en renforçant l’occupation – donnant lieu à un travail de réseau entre l’UNIÃO, le Mouvement 2 de Julho et le MSTS.
 
Au quotidien des initiatives communautaires intéressantes prennent forme sur le terrain. Un petit verger a vu le jour à la suite de la mise en place de l’eau courante grâce aux efforts de Cosme, coordinateur du Mouvement 2 de Julho. Les enfants bénéficient de l’attention de Jeani, coordinatrice du MSTS, dans une salle du casarão (grande maison de la ferme). Et les idées abondent : implémentation de biodigestores (Station d’épuration des eaux qui produit du biogaz principalement du méthane, propice à l’usage des ménages, et qui rend l’eau usagée apte à être utilisée dans le cadre d’une plantation communautaire par exemple, tout comme les déchets du processus chimique qui donne du biofertilisant), implémentation encore de panneaux solaires, de l’utilisation de la technologie de la permaculture dans le cadre du verger communautaire, de la création d’une éventuelle pisciculture sur les bas du terrain où un petit cours d’eau y tient son lit et encore de diverses initiatives de coopératives.
 
Communication
 
L’équipe de communication fonctionne déjà avec une certaine autonomie. Everaldo, coordinateur de communication de l’UMP-BA, et Marli ont été formés pour administrer le site www.ba.unmp.org.br  et ont publié quelques articles lors de notre séjour en Suisse. Everaldo est aussi l’auteur d’un petit journal informatif distribué mensuellement, même si il est vrai que l’édition de ce bulletin reste encore sporadique. Globalement, la rédaction de l’UNIÃO s’amplifie à chaque fois un peu plus. Marli, Joará, Cesar, Everaldo, Deni et les mouvements partenaires ont pris en main la divulgation des avancées des mouvements urbains. Niveau média public, le collectif bénéficie toujours et encore de la possibilité d’envoyer des communiqués de presse adoptant un ton factuel. Quant au flyer que nous avons monté, il est pratiquement écoulé et semble avoir plu à la majorité.
 
Nous essayons encore de développer une radio communautaire sur le projet de Paripe. Dans cette optique, l’équipe est à la recherche de fonds pour acquérir le matériel nécessaire à la mise en place de cet outil qui renforcera la cohésion communautaire, la formation ludique des personnes sur place à travers des programmes éducatifs et la promotion de la culture locale.
 
Au niveau de la communication interne, nous avons d’abord beaucoup travaillé à notre rentrée sur la mise en place d’outils de publipostage susceptible d’atteindre les personnes ne bénéficiant pas forcément d’un accès à internet. Cela facilitera aussi la convocation des mutirantes des projets du Crédit Solidaire qui était faite auparavant par téléphone. Ensuite, les tableaux blancs de planification des activités au sein du siège sont largement utilisés de manière participative et cela malgré des rendez-vous fluctuants au gré des jours. A noter, la planification est aussi éditée publiquement sur le site. Et puis, une seconde ligne de téléphone a été mise en place – histoire de dégorger la première et de permettre à l’équipe opérative de se joindre sans trop de difficulté à tout moment de la journée.
 
Enfin, dès notre retour, nous avons été plongé dans le lancement de la campagne nationale pour l’habitat digne (http://www.moradiadigna.com.br/ ) qui préconise l’augmentation du Fond National pour l’Habitat d’Intérêt Social (FNHIS). Cette initiative demande l’allocation de 2% du budget fédéral, de 1% du budget de l’Etat et des municipalités aux différents projets de construction de logements sociaux. La coordination nationale compte recueillir au minimum 1 million de signatures jusqu’à la fin de l’année 2008 afin de les remettre au Congrès National. Il y a de fortes chances pour que les mouvements urbains organisés arrivent à recueillir ces signatures bien avant la date butoir.   http://ba.unmp.org.br/index.php?option=com_content&task=view&id=103&Itemid=56
 
 
Dias Melhores
 
Depuis plus d’une année, l’UNIÃO participe activement à l’élaboration d’un projet d’amélioration des zones présentant des carences urbaines avec le Secrétariat de Développement Urbain de l’Etat de la Bahia (SEDUR). Dans ce cadre, le mouvement devrait être mandaté en tant qu’Opérateur Social dont la mission est de :
 
“Contribuer, en coparticipation avec les communautés et les instances du  gouvernement, pour donner une impulsion au développement intégré des communautés dans les zones prises en charge par le projet.” (extrait du terme de référence du projet)
 
En plus simple, il s’agit d’établir un diagnostic rapide d’une aire de la ville, en l’occurrence Pau da Lima (50 000 habitants) pour l’UNIÃO, de recenser et recruter les leaders de quartiers, d’engager des éducateurs habilités à former ces personnes sur différentes thématiques pour qu’ils deviennent les interlocuteurs du gouvernement. En effet, le projet Dias Melhores s’évertue à intégrer les demandes de la base populaire dans le cadre de son intervention. Au final de quoi, les zones les plus démunies devraient recevoir une aide substantielle : égouts,  routes bétonnées, assainissement des maisons, construction ou réforme de locaux associatifs, renforcement du système de santé et scolaire, etc. Les futurs opérateurs sociaux tels que l’UNIÃO constituent en quelque sorte des médiateurs entre la société civile et les gouvernements afin que les projets de développements urbains soient totalement adéquats en fonction du public et du terrain où il sera implanté. Dans un second temps, l’UNIÃO serait amené à accompagner les projets physiques de construction auprès de la communauté.
 
Dias Melhores représente un investissement de l’Etat de la Bahia de plus de 40 millions de dollars à travers la Banque Mondiale. Le projet compte sur l’appui de l’agence de coopération italienne, la Fondation AVSI, la SEDUR, la Banque Mondiale, la CAMMPI, Caritas Brésil et l’UNIÃO. En phase initiale, le projet devrait démarrer grâce à un don du gouvernement italien.
 
 
Santa Rosa de Lima
 
Lors de la rencontre annuelle des volontaires E-CHANGER, nous avions proposé trois possibilités de partenariats à travers le réseau de la coordination brésilienne. L’un d’entre eux a trouvé écho dans la communauté de Santa Rosa de Lima où Mira est l’une des leaders principales. Le CEDECA (Centre de Défense de l’Enfant et de l’Adolescent) accompagne actuellement la création du réseau  « Pro Juventude » qui s’évertue à regrouper le travail destiné aux enfants de toutes les entités avoisinantes afin de mieux coordonner et répondre aux attentes d’un public en situation de risque dans ces favelas. De fait, le nouveau centre communautaire est investi par les principaux protagonistes de ce réseau. Des ateliers de musique, de graffitis, de hip hop, des projections de films sont prévus dans une ambiance participative avec les jeunes. A même de proposer des activités, leur intérêt pour le centre augmente de jour en jour. Le public cible, les jeunes en situation de risque, commence à affluer. A moyen terme, le réseau « Pro Juventude » espère éradiquer les problèmes de trafic de drogues et les violences de toutes sortes en proposant un cadre propice au développement personnel de chacun.
 
AMAR
 
Dès notre retour, nous avons été plongés dans le travail de l’association AMAR (Amis du Mouvement des Adolescents en situation de Risque) à travers le cours de théâtre offert par David Van de Woestyne dans le quartier d’Uruguai. Nous travaillons toujours de pied ferme sur la restructuration de l’association afin qu’elle bénéficie d’un local d’activités (Capoeira, théâtre, renforcement scolaire, artisanat et atelier de vélo) et d’un abri pour les jeunes qui dormiraient dans la rue afin de les accueillir dans de bonnes conditions. Nous sommes encore à la recherche d’une maison susceptible de se transformer en foyer. Quant au local d’activités, nous l’avons probablement trouvé au cœur d’Uruguai. Il est actuellement occupé par un groupe de travail social nommé Phenix.
 
Phenix développe déjà un renforcement scolaire de qualité et promeut la Capoeira et le Théâtre, mais se trouve dans la difficulté de répondre à toutes les demandes et activités. Ce projet social déjà existant serait prêt à ouvrir cet espace avec AMAR qui développerait conjointement la Capoeira, le Théâtre, l’artisanat et l’appui scolaire dans ce même cadre en établissant un travail de réseau commun. Le point fort de ce partenariat serait, selon nous, un renforcement mutuel. Phenix est une équipe de professionnelles qui lutte et qui est reconnue pour son travail d’alphabétisation. Les jeunes d’AMAR pourraient directement en bénéficier, tout en se sociabilisant avec d’autres enfants qui ne sont pas de le même genre de difficultés, cela pour éviter une « ghettoïsation ». L’équipe nous a semblé avoir une bonne assise et être bien dynamique, ce qui peut renforcer aussi le moteur et la cohérence que nous cherchons à atteindre. AMAR n’a pas les moyens de se payer une équipe d’encadrants, tout comme Phenix semble être demandeur à amplifier le nombre de personnes travaillant avec eux.
 
L’espace coûterait à AMAR 75 reais par mois (150 divisé par les deux entités), ce qui nous laisserait l’occasion de développer un foyer avec un autre loyer où nous aimerions aménager un atelier, le secrétariat AMAR et un foyer pour les enfants et adolescents bénéficiaires d’AMAR. Nous sommes donc en pleine réflexion pour partager cet espace au nom d’AMAR et de Phenix tout en ayant un espace propre extérieur au travail avec Phénix. Cela semble envisageable, mais avec toujours la même difficulté en tête : le comité de l’association se refuse à être le bailleur de fonds d’une autre association. Il est question dans ce cas de développer des activités en commun ou Phenix et AMAR apparaissent toutes les deux comme entités parties prenantes du projet. Cela signifie que nous allons devoir discuter beaucoup à propos de nos visions, objectifs et méthodologies pour savoir si nous sommes capables de travailler ensemble. Nous envisageons déjà un atelier institutionnel court (1 journée), mais permettant de terminer sur un accord écrit qui clarifierait totalement cet éventuel partenariat.
 
Petite Pensée à Pierre Demouliere, fondateur du projet AMAR, qui continue, malgré sa maladie a s’engager auprès des jeunes d’AMAR. Un Dimanche par mois, le comité de l’association se réunie dans sa jolie maison, petit havre de paix dont Saint François d’Assise serait fier, au cœur d’un quartier populaire de la ville agitée et bruyante. Chez Marie et Pierre, le temps semble comme arrêté …
 

LA PATIENCE
 
Parlons de la patience.
C’est la sauce de l’espérance,
C’est le bain-marie de la cocotte,
C’est le pot-au-feu qui mijote.
 
Dans l’attente d’une visite prévue,
Dans l’espoir d’un emploi en vue,
Dans l’angoisse d’un fils rebel,
La patience est la résolution modèle.
 
Quand une chose attendue n’arrive pas,
Quand le désespoir poursuit nos pas,
Ou l’on s’énerve amèrement,
Ou l’on exerce sa patience doucement.
 
Il y a la patience imposée,
Il y a la patience acceptée,
Il y a la patience passive,
Il y a la patience active:
Celle que tu alimentes
Par ton action pensante.
 
Le temps ne nous appartient pas,
Il passe devant nous au pas à pas,
Et chaque chose espérée intensement
Arrive toujours bien en son temps.
 
Chez le médecin ou le dentiste,
A l’hôpital, chez l’occuliste,
On attend tant,
Qu’on nous appelle patients.
 
Dans le malheur, dans l’attente, en toute circonstance,
Ne perds jamais l’espérance,
Ton ami te dira: “ Sois patient,
Tout arrive en son temps.”
 
Poème de Pierre Demouliere.

Salvador de Bahia,
Tiago, Claire Rinaldi et Olivier Grobet
 

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