La guerre en Colombie n’est pas une fatalité. Elle ne constitue pas non plus la seule alternative pour la jeunesse de ce pays sud-américain. Cette conviction anime la réflexion du dirigeant paysan (« vocero regional ») Camilo López, responsable de l’éducation et de la culture chez CIMA, organisation partenaire de E-CHANGER.
« Il est nécessaire de construire un autre paradigme de la nation, sur la base d’une solution politique, et démontrer par là qu’une autre Colombie est possible », souligne López, artiste plasticien diplômé de l’Université du Cauca, spécialisé en éducation interculturelle.
López est responsable du secteur éducation et culture au Comité d’intégration du massif colombien (CIMA), une organisation paysanne qui travaille dans les départements du Cauca et de Nariño, situés à l’extrémité sud-est du pays, à la frontière avec l’Equateur.
Conflit toujours présent
« Mon pays, et notamment le territoire où travaille le CIMA, continuent d’être le théâtre d’un grave conflit », relève Camilo López pour présenter la situation actuelle.
« Jusqu’ici, le nouveau gouvernement de Juan Manuel Santos ne représente pas une réelle alternative à la situation vécue durant les années précédentes, sous la présidence d’Álvaro Uribe.
Une continuité qui s’exprime, par exemple, dans le monde rural, par la permanence du problème crucial de la terre. « Il n’y a pas de réelle solution. Même s’il existe une loi des terres qui proclame, au niveau du discours, l’affectation de parcelles aux personnes déplacées victimes du conflit, cette loi contient des clauses qui ne facilitent en rien une véritable solution de cette question ».
« Le conflit continue. Les organisations sociales comme la nôtre sont criminalisées et poursuivies », affirme Camilo López. Tout cela malgré le fait que, depuis toujours, « notre position est claire. Le conflit dont nous souffrons est social et armé. Mais la seule issue réside dans une solution politique négociée ».
Minimiser l’impact
Le CIMA priorise trois axes de travail principaux : les droits humains, la protection de l’environnement, l’éducation et la culture.
Concernant ce troisième point, « le travail avec les jeunes, axé plus spécifiquement sur leur participation culturelle, musicale et sportive, devient essentiel ».
« Nous mettons sur pied des ateliers, organisons des groupes artistiques, promouvons la danse, le théâtre et les groupes zanqueros. En résumé, nous tentons d’occuper les enfants et les adolescents de manière consciente et positive ».
Pour le porte-parole du CIMA : « Avec la culture et l’éducation dans chaque communauté, nous aspirons à redonner espoir à la jeunesse de notre région et à minimiser l’impact du conflit. Cela en empruntant et respectant leurs rêves, partagés par tous les jeunes Colombiens, Suisses ou Latino-Américains, et en leur permettant de croire ainsi à un autre pays possible, loin de toute issue militaire ».
« Ils voudraient accéder à l’emploi, à l’éducation, à de saines distractions, poursuit Camilo López, mais beaucoup de ces revendications simples, basiques même pour n’importe quel jeune dans n’importe quel pays du monde, sont aujourd’hui reléguées au rand d’utopies dans le Massif ».
La Suisse solidaire
« Nous nous rendons dans des collèges, des universités, entrons en contact avec des groupes d’intérêt, des associations culturelles et religieuses, spécialement pour rencontrer des jeunes. Nous réalisons des ateliers participatifs et partageons nos réalités respectives pour apprendre à mieux nous connaître ».
Pour Camilo López, ce voyage en terre helvétique « a représenté une magnifique occasion d’activer la solidarité entre la Suisse et le Massif colombien, de renforcer notre coopération solidaire avec E-CHANGER et qui plus est, de partager avec la jeunesse suisse les rêves des jeunes Colombiens ».
« L’appui de E-CH en ressources humaines est vital », conclut-il. « Cela nous permet de développer une coopération beaucoup plus sensible et réfléchie. Ce qui entraîne un travail commun, en Colombie et en Suisse, irréalisable sans la passerelle active et engagée que constitue la volontaire ».
Sergio Ferrari
Traduit de l’espagnol : H.P. Renk
Campagne en Suisse
Camilo López et Dominique Rothen – coopér-actrice E-CH auprès du CIMA depuis octobre 2009 – ont effectué une campagne de sensibilisation et d’information durant la seconde quinzaine de mai et la première quinzaine de juin 2011. Celle-ci fut impulsée par E-CH et Vientos de Popayán, le groupe d’appui de la coopér-actrice. Cette fructueuse initiative a également bénéficié de l’appui de SUIPPCOL, d’Amnesty International / section suisse, du Groupe de travail Suisse-Colombie et d’autres associations helvétiques. Durant ces trois semaines, la coopér-actrice et son partenaire colombien ont animé une vingtaine d’activités, dans une dizaine de villes situées dans huit cantons. (SFi)