Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 73 – Genève, le 28 juin 2012

La formation des professeurs Yanomami / Dilma Rousseff démarque sept Terres Indigènes / La CNPI reprend ses activités / Le « Campement Terre Libre » à Rio+20.

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La formation des professeurs Yanomami
Ils sont plus d’une vingtaine de professeurs Yanomami, venant de huit communautés des rios Marauiá et Demini, à participer à la 10e étape – sur 12 – d’une formation leur permettant d’obtenir, en 2014, la certification reconnue par les autorités. Ce cours de six semaines a commencé le 21 mai. Il entre dans le cadre du programme d’éducation de l’association « Service et Coopération avec le Peuple Yanomami* – SECOYA » soutenu par l’ambassade d’Australie. Il a lieu à Poraquê, dans la municipalité de Rio Preto da Eva, à environ 80 km au nord de Manaus. Si les disciplines enseignées concernent des matières traditionnelles : mathématiques, art et expression culturelle, littérature, informatique de base, d’autres sont plus spécifiques comme l’éducation scolaire différenciée, la citoyenneté et les droits indigènes. Tout en veillant à mettre en pratique la législation en vigueur, il s’agit d’une gestion participative où toutes les décisions (sur le calendrier, la charge horaire, les contenus) sont prises collectivement. L’objectif de SECOYA est d’élaborer une proposition d’éducation scolaire différenciée qui puisse être reconnue par les pouvoirs publics de l’État d’Amazonas et par le Ministère de l’éducation. L’une des caractéristiques de l’enseignement « différencié » consiste à avoir les premiers degrés d’enseignement en langue yanomami, le portugais étant enseigné dans un deuxième temps. Il s’agit également de proposer, par l’école, une alternative aux politiques publiques d’assistance. Ces dernières sont susceptibles de répandre, chez les bénéficiaires, les Yanomami, l’idée que les solutions des problèmes auxquels ils sont confrontés vont être apportées par d’autres acteurs. Ils courent le risque de n’être que les spectateurs des changements qui les affectent, alors que leur intérêt est d’être les protagonistes de leur propre histoire. L’école différenciée peut contribuer au renforcement du pouvoir de ce peuple sur son propre devenir.
* Le partenaire de AYA
Dilma Rousseff démarque sept Terres Indigènes
Le 5 juin était la Journée mondiale de l’environnement. Ce jour-là, le gouvernement a annoncé l’homologation de sept Terres Indigènes (TI), la création de deux Unités de conservation et l’extension de trois autres. Dilma a également signé le décret relatif à la « Politique Nationale de Gestion Territoriale et Environnementale des Terres Indigènes » – PNGATI. Cinq des TI homologuées se situent dans l’État d’Amazonas, une dans l’État d’Acre et l’autre dans le Pará, près d’Altamira…. Ensemble, elles couvrent une superficie de 9’503 km2. La PNGATI se veut une mise en oeuvre de la Convention 169 de l’OIT. Elle a pour objectif de garantir et promouvoir la protection, la conservation et l’usage soutenable des ressources naturelles des terres et territoires indigènes. Elle veut aussi assurer l’intégrité du patrimoine indigène, l’amélioration de la qualité de vie physique et culturelle des actuelles et futures (générations) de peuples indigènes. Sônia Guajajara, la vice – coordinatrice de la Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne – COIAB, était l’invitée de la Présidente de la république pour représenter les peuples indigènes à la célébration de la Journée mondiale de l’environnement. Sônia a saisi cette occasion pour remettre à Dilma un manifeste reprenant, en huit points, les principales revendications des peuples indigènes du pays. Par exemple la suspension des ouvrages qui affectent les TI jusqu’à ce que soit réglementée, et appliquée, la procédure de consultation préalable, libre et informée, prévue par la C169. Les décisions prises ce 5 juin semblent marquer l’amorce d’un changement d’attitude du gouvernement sur les questions indigènes. L’approche de Rio+20 a-t-elle joué un rôle ?
La CNPI reprend ses activités
Une réunion extraordinaire de la Commission Nationale de Politique Indigéniste – CNPI a eu lieu les 4, 5 et 6 juin à Brasilia. Cette rencontre marque la reprise de l’activité de la CNPI qui ne s’est plus réunie depuis juin 2011. Les représentants indigènes avaient alors conditionné la poursuite de ces rencontres à la présence de la présidente de la république pour un contact direct. Faute d’avoir obtenu gain de cause, la CNPI avait suspendu toute activité. Les thèmes de la santé indigène et des femmes indigènes ont largement été abordés lors de cette réunion.
Pour en savoir plus (en portugais) http://www.funai.gov.br/ > 4 juin 2012 > 5 juin 2012 > 8 juin 2012
Le « Campement Terre Libre » à Rio+20
À Rio, à l’occasion de la réunion de Conférence des Nations Unies, les peuples indigènes ont organisé, du 15 au 22 juin, la IXe édition de leur « Campement Terre Libre » – ATL, la rencontre annuelle des indiens du pays. D’autres organisations indigènes d’Amérique centrale et du sud étaient également présentes.
Les 1’800 participants ont adopté une « Lettre de Rio de Janeiro« . Un texte signé par l’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil – APIB, la Coordination des Organisations Indigènes du Bassin Amazonien – COICA, la Coordination Andine des Organisations Indigènes – CAOI, le Conseil Indigènes de l’Amérique Centrale – CICA et le Conseil Continental de la Nation Guarani – CCNAGUA. Le texte appelle d’abord la nécessaire mise en place de nouvelles relations entre les États et les Peuples indigènes pour la construction d’un nouveau modèle de société. Une deuxième partie dénonce les fausses solutions aux crises qui frappent la planète. Plus concrètement, le texte dénonce les violences commises à l’encontre des dirigeants et des peuples indigènes qui luttent pour la défense de leurs droits; les ouvrages construits dans les territoires indigènes; les institutions qui financent ces grands travaux; les contrats REDD* et les crédits carbone; la réduction des territoires indigènes; toutes les institutions qui visent à soumettre les droits indigènes au grand capital. Le texte dénonce également l’action de Marco Terena, un leader, qui a organisé une manifestation parallèle sans lien avec les organisations indigènes du pays. La troisième partie du texte est un ensemble de propositions, un appel au respect des droits fondamentaux, territoriaux, culturels des peuples indigènes. En conclusion de leur déclaration, les signataires affirment que « Finalement ce ne sont pas les fausses solutions proposées par les gouvernements et ce que l’on appelle l’économie verte qui solderont les dettes des États envers nos peuples« . Les représentants indigènes ont voulu remettre ce document aux dirigeants présents à la Conférence officielle. Empêchés d’entrer par le service de sécurité, ils ont été reçus, le 21 juin, par une délégation de la présidence de la république. Un calendrier de travail a été fixé pour les mois à venir. Les représentants du gouvernement ont également reçu les délégués de la rencontre organisée à l’initiative de Marco Terena au cours de laquelle une déclaration appelée « Kari-Oca 2 » a également été adoptée par les participants. D’autres manifestations indigènes ont eu lieu à l’occasion de la Conférence. Par exemple, la protestation organisée devant le siège de la Banque Nationale de Développement Economique et Social – BNDES qui apporte les crédits pour la construction de nombreuses infrastructures, dont le barrage de Belo Monte. Des représentants de l’APIB ont obtenu un contact avec le vice-président de la banque. Si Rio+20 n’a pas répondu aux attentes des peuples indigènes, la conférence a été l’occasion de rencontres entre les organisations indigènes brésiliennes et le gouvernement. À suivre…
* REDD : Réduction des Émissions de gaz à effet de serre en raison de la Déforestation et de la Dégradation des forêts.
Pour en savoir plus (en portugais) :
– La Déclaration finale du « Sommet des Peuples » (auquel l’ATL a participé) a été publiée sur le site du Mouvement des travailleurs Sans Terre – MST.
– En français : Le texte adopté par la Conférence des Nations Unies « L’avenir que nous voulons »
Bernard Comoli
Important : L’activation des liens hypertextes renvoie aux sources ou aux documents originaux utilisés pour la rédaction de ce bulletin. Elles sont souvent en portugais, sauf quand il s’agit d’anciens « AYA Info ».
PS 1 : Ces brèves sont souvent reprises, détaillées et illustrées, dans un blog du quotidien « La Tribune de Genève » à l’adresse suivante : http://bcomoli.blog.tdg.ch
PS 2 : Pause estivale (en Europe) oblige : « AYA info » donne rendez-vous à ses lecteurs au mois d’août !
AYA – Appui aux indiens Yanomami d’Amazonie
15 Chemin de la Vi-Longe – CH – 1213 Onex / Genève – CCP 17-55066-2

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