Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 33 Genève, le 9 novembre 2008

La Constitution brésilienne a vingt ans, Un « Aty Guasu » des Guarani Kaiowa du Mato Grosso do Sul, Almir Suruí reçoit le prix SIDH des Droits de l’homme, Le « Fonds pour l’Amazonie » commence à fonctionner.

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La Constitution brésilienne a vingt ans
L’actuelle Constitution du Brésil, la septième du pays, a été promulguée il y a vingt ans, le 5 octobre 1988. Plusieurs de ses articles, en particulier l’article 231, consacrent les droits des indiens, notamment les droits liés aux Terres Indigènes (TI). La reconnaissance de ces droits est le résultat de l’action menée par des leaders indigènes et de plusieurs organisations indigénistes. Deux propositions d’amendements au projet de Constitution ont été déposées au Parlement en 1987. L’une, par le Conseil Indigéniste Missionnaire (CIMI) et deux autres organisation indigénistes, signée par 44’171 électeurs. L’autre, a été présentée par l’Union des Nations Indigènes (UNI), à l’époque seule organisation indigène et une quinzaine d’associations et autres entités indigénistes. Celle-ci a été signée, par 43’057 électeurs. Les intérêts anti-indigènes, relayés par les grands organes de presse, en particulier le quotidien « O Estado de São Paulo », ont manifesté leur opposition à la reconnaissance de ces droits dans la Constitution. Les membres de la Constituante avaient fixé au gouvernement un délai de cinq ans, soit jusqu’au 5 octobre 1993, pour protéger (démarquer) toutes les TI du pays. Quinze ans après cette échéance, la démarcation n’est pas achevée. Le nombre de TI varie selon les sources. Pour le CIMI, qui compte celles pour lesquelles aucune mesure n’a été prise, il y en a 847. La Fondation Nationale de l’Indien (FUNAI) en compte 654 dans un document récent et l’Institut Socio – environnemental (ISA) avance le chiffre de 628 au 5 octobre 2008. Leur étendue est légèrement supérieure à un million de km2. Elles couvrent entre 12 et 13% du territoire national. Pour ISA, il reste près de deux cents TI à démarquer. C’est la FUNAI qui est chargée de ce travail pour lequel elle souffre d’un manque chronique de moyens*. Les opposants à la démarcation sont toujours actifs : actuellement, c’est par dizaines que l’on compte recours déposés au Tribunal Suprême Fédéral contre la démarcation de telle ou telle TI.
*Voir AYA Info No 26
Source : « Povos Indígenas no Brasil 1987 – 1990 » – Editions du Centro Eucumênico de Documentação e Informação – CEDI – São Paulo – 1991. Pour en savoir plus (en portugais) sur la Constitution brésilienne:
http://www.funai.gov.br/ > Legislação > Constituição Federal de 1988
Un « Aty Guasu » des Guarani Kaiowa du Mato Grosso do Sul
Les 250 à 300’000 Guarani sont présents dans cinq pays : Argentine, Bolivie, Brésil, Uruguay et Paraguay (où le guarani est langue officielle avec l’espagnol). Ils sont répartis en divers groupes qui, s’ils parlent la même langue, et sont culturellement très semblables, portent des noms différents. Au Brésil, ils sont près de 46’000. On en trouve dans sept États de l’Union, généralement regroupés en petites communautés, sur des Terres de faible envergure qui, souvent, ne correspondent pas aux limites de leurs Terres traditionnelles. Le confinement sur des espaces restreints est à l’origine de problèmes graves : taux élevé de mortalité infantile, suicides de jeunes, assassinats et conflits de la terre avec les fazendeiros. En juillet dernier, la FUNAI a commencé les études pour identifier ces terres traditionnelles dans l’État du Mato Grosso do Sul en vue de leur démarcation. Cela a suffi pour déclencher une campagne anti-indigène orchestrée par les politiciens et fazendeiros opposés à la démarcation. Plus de 600 Guarani de cet État ont tenu un « Aty Guasu » (une grande réunion en guarani) du 29 octobre au 1er novembre à Campestre, un village de la TI Ñanderu Marangatu dans la municipalité d’Antonio João, proche de la frontière avec la Paraguay. Ils demandent notamment que soit assurée la sécurité des membres des Groupes de travail de la FUNAI et des leaders indigènes. Ils demandent également que la FUNAI accélère l’élaboration de rapports solidement argumentés de manière à ne pas pouvoir être remis en question. La réunion a encore été l’occasion de célébrer la mémoire des leaders qui ont donné leur vie pour la défense de leur peuple.
Pour en savoir plus (en portugais) sur le peuple Guarani :
http://www.campanhaguarani.org.br/home.htm et sur le récent « Aty Guasu » :
Almir Suruí reçoit le prix SIDH des Droits de l’homme
Le 25 octobre dernier, à Genève, au cours d’une cérémonie qui a eu lieu au Victoria Hall, Almir Narayamoga Suruí* a reçu le prix « Droits de l’Homme » de la section suisse de la Société Internationale pour les Droits de l’Homme – SIDH. Almir est le coordinateur de l’Organização Metarelá do Povo Suruí. Il est également responsable de l’ethno-développement à la Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne – COIAB. Il a été récompensé pour son engagement dans la lutte contre la déforestation et pour la défense des droits indigènes. Les Suruí, au nombre d’environ un millier, occupent la Terre Indigène « Sete de Setembro »qui s’étend sur les deux États de Rondônia et du Mato Grosso. Démarquée en 1983, elle a une superficie de près de 2’500 km2. La SIDH a été fondée en 1972 afin de soutenir les personnes qui réclament leurs droits d’une manière non violente. Elle a son siège en Allemagne, à Francfort. Elle compte environ 30’000 membres dans 26 pays. La section suisse a été créée en 1983.
*Voir AYA Info No 12 et 30.
Pour en savoir plus (en portugais) sur le peuple Suruí : http://www.paiter.org/ et sur la section suisse de la SIDH (en français): http://www.igfm.ch/Accueil.html
Le « Fonds pour l’Amazonie » commence à fonctionner
Le Comité d’orientation du « Fonds Amazonie » a été réuni pour la première fois le 24 octobre à Rio de Janeiro. Il a pour objectif d’établir les lignes directrices et les critères d’utilisation des ressources du Fonds. Celles-ci devraient profiter aux communautés locales et peuples indigènes qui contribuent à la conservation de la forêt. Il devrait appuyer les stratégies qui réduisent effectivement la déforestation. Ce Comité est composé de neuf représentants de divers Ministères et de la Présidence de la République, de huit représentants des États de l’Amazonie brésilienne et de six représentants d’organisations de la société civile, dont un membre de la Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne (COIAB). Le Fonds a été créé au début du mois d’août par une « Mesure Provisoire » du Président de la République adoptée par la Chambre des Députés le 15 octobre. Il est géré par la Banque Nationale de Développement Économique et Social – BNDES. Ce Fonds répond aux vœux du collectif d’associations qui a présenté, à Brasilia en octobre 2007, un « Pacte pour la valorisation de la forêt et la fin de la déforestation en Amazonie ». Ce Pacte propose la « déforestation zéro » en 2015*. Ces associations ont trouvé un écho favorable auprès du Gouvernement norvégien. En effet, la Norvège a un programme national et international de protection de la forêt. Elle a annoncé une première contribution au Fonds brésilien de 130 millions de dollars US, avec une exigence de résultats pour la poursuite de l’aide. Cette information a été diffusée à Brasilia à l’occasion de la visite du Premier ministre norvégien, Jens Stoltenberg qui était au Brésil, en septembre dernier, pour célébrer l’appui que donne son pays aux indiens du Brésil depuis 25 ans.
* Voir AYA Info No 16
Pour en savoir plus (en portugais ) : http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2749 ,
http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2750, http://www.socioambiental.org/nsa/detalhe?id=2787 et http://www.mma.gov.br/ascom/ultimas/index.cfm?id=4437 . Voir aussi (en français) : Le Monde Diplomatique, octobre 2008 « Le business de la « forêt verte » en Amazonie », Jacques Denis, pages 22 et 23.
Bernard Comoli

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