Quelques brèves concernant l’Amazonie et les Indigènes du BrésilAYA Info – No 38 Genève, le 30 avril 2009

Menaces sur la santé indigène dans le Roraima; Des sénateurs veulent contrôler la démarcation des Terres Indigènes; Raposa Serra do Sol : les organisations indigènes créent une Fédération de Réoccupation; Sœur Dorothy Stang, une justice à rebondissements

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Menaces sur la santé indigène dans le Roraima
Pour assurer le service de santé aux populations indigènes, la Fondation Nationale de la Santé (FUNASA) passe des conventions avec des entités qui agissent sur le terrain. Dans l’État de Roraima, trois entités ont signé une telle convention, le « Conseil Indigène de Roraima » (CIR), le Diocèse de Roraima et l’association « Service et Coopération avec le Peuple Yanomami » (SECOYA). Ces conventions arrivent à échéance en mai pour le CIR et la SECOYA, et en juillet pour le Diocèse de Roraima. La SECOYA a déjà fait connaître son intention de ne pas renouveler la convention pour le service de santé indigène dans cet État. Les trois entités se plaignent de l’administration de la FUNASA. En particulier des retards dans le versement des subventions qui perturbent sérieusement le service de santé dans les communautés. Cela a de graves répercussions sur l’état de santé des populations indigènes. La prochaine échéance des conventions et les dysfonctionnements du service de santé se produisent au moment où le gouvernement brésilien a décidé de décharger la FUNASA du service de santé indigène* pour le confier à une autre administration pas encore désignée. Cette situation est inquiétante. Le 19 mars, les trois entités, avec Hutukara Association Yanomami (HAY), l’Organisation des femmes indigènes de Roraima (OMIR) et l’Institut Socio-environnemental (ISA), ont publié un document dans lequel elles demandent au gouvernement d’accélérer le processus de transfert du service de santé indigène de la FUNASA vers une autre administration. Elles formulent sept autres revendications, notamment pour améliorer le service de santé, son administration et le contrôle social par des représentants des populations indigènes. Elles demandent que le service de santé soit garanti pendant cette période de transition. Dans les premiers jours d’avril, le CIR, la SECOYA et le Diocèse de Roraima ont été mis en cause dans la presse locale, leur attribuant la responsabilité des dysfonctionnements. Les trois organismes ont répondu le 15 avril par un communiqué non repris par les medias. Le processus de choix des entités susceptibles d’assurer le service de santé indigène dans l’Etat de Roraima vient à peine de commencer. Le service de santé dans les communautés Yanomami de Roraima va probablement être interrompu un certain temps.
* Voir AYA Info No 27
Pour en savoir plus (en portugais) : Les documents des 19 mars et 15 avril peuvent être demandé au soussigné.
Des sénateurs veulent contrôler la démarcation des Terres Indigènes
Le 25 mars dernier, la Commission « Constitution, Justice et Citoyenneté » (CCJ) du Sénat brésilien a remis à l’ordre du jour de ses travaux l’examen de deux propositions de modification de la Constitution fédérale de 1988. La première « Propositions d’amendement constitutionnel » (PEC 38/1999) a été déposée par Mozarildo Calvacanti, un sénateur de l’État de Roraima, et l’autre (PEC 3/2004) par le sénateur Juvêncio da Fonseca qui représentait l’État du Mato Grosso du Sud. Ces propositions visaient essentiellement à limiter à 30% de la superficie d’un État, les surfaces occupées par les Unités de conservation et les Terres indigènes (TI), d’attribuer au Sénat fédéral l’approbation du processus de démarcation des TI jusqu’alors confiée au Président de la République et à modifier l’indemnisation des occupants. Le rapporteur de la CCJ ne retient pas la surface maximale pouvant être occupée par les TI, mais il maintient l’approbation de la démarcation par le Sénat. Il propose que le Gouvernement fédéral indemnise les occupants des TI détenteurs d’un titre de propriété antérieur au 5 octobre 1988, date de l’adoption de la Constitution. L’indemnité devant correspondre à la valeur de la terre nue et pas seulement pour les améliorations apportées de bonne foi par ces occupants, comme le prévoit déjà la Constitution. L’Articulation des Peuples Indigènes du Brésil (APIB) qui rassemble les principales organisations régionales de tout le pays, rejette les deux propositions d’amendement. Pour l’APIB, la nouvelle forme d’indemnisation légalise l’usurpation des Terres Indigènes et les inclut dans la logique du marché. Cela implique une grave agression au lien culturel et spirituel avec la Terre Mère. Elle déplore que les Terres Indigènes et les Unités de conservation soient considérées comme des obstacles au développement, alors que la préservation des forêts et de la biodiversité sont une contribution significative pour le ralentissement des changements climatiques qui menacent la planète et l’humanité. Elle refuse de soumettre à des critères politiques (l’approbation par le Sénat) la base matérielle de la survie physique, culturelle et spirituelle des peuples indigènes : les territoires qu’ils occupent traditionnellement. L’APIB demande aux sénateurs de rejeter les deux propositions d’amendement.
Pour en savoir plus (en portugais) :
Raposa Serra do Sol : les organisations indigènes créent une Fédération de Réoccupation
À la suite de son jugement rendu le 19 mars dernier, le Tribunal Suprême Fédéral (STF) qui a validé la démarcation en aire continue de la Terre Indigène Raposa Serra do Sol (TI RSS), la cour a donné jusqu’à ce 30 avril pour que les occupants illégaux de la TI quittent les lieux. La question de la réoccupation se devait d’être réglée. Le 17 avril, des délégués des neuf organisations indigènes qui cohabitent Raposa Serra do Sol se sont retrouvés avec les représentants des autorités judiciaires, de la police fédérale et de la Fondation nationale de l’Indien (FUNAI). Il s’agissait de conclure un accord sur la manière dont les indigènes allaient réoccuper les terrains laissés libres après le départ des non – indiens. Ils ont créé une « Fédération Indigène de Réoccupation de la Terre Indigène Raposa Serra do Sol ». Il a été prévu que les représentants de la Fédération se rendent à Brasilia pour rencontrer le juge Ayres Britto, chargé du suivi de la décision du STF, pour lui soumettre les termes de la réoccupation. Il a également été décidé de convoquer, dans les 90 jours, une assemblée générale de la Fédération pour élaborer une politique agricole de développement soutenable. La Chambre des députés a créé une Commission pour suivre le processus d’évacuation. Cette Commission a cherché à prolonger le délai, ce qui a été refusé. Selon la « Folha de Boa Vista », le principal riziculteur occupant la TI a déjà démoli une partie des bâtiments de l’une des deux fazendas qu’il avait installées sur Raposa Serra do Sol. Les autorités souhaitent que les opérations d’évacuation se déroulent dans le calme. À suivre…
Pour en savoir plus (en portugais) :
Sœur Dorothy Stang, une justice à rebondissements*
Le jugement des personnes accusées d’être impliquées dans l’assassinat, le 12 février 2005, de la religieuse americano – brésilienne connaît des rebondissements. Le fazendeiro Vitalmiro Bastos Mura, connu sous le nom de « O Bida », considéré comme l’un des mandants de l’assassinat a été condamné une première fois en mai 2007 à 30 ans de prison. Un an plus tard, le 8 avril 2008, il est innocenté et libéré par une cour de Belém. Ce 7 avril 2009, le Tribunal de Justice de l’État du Pará annule cette décision. « O Bida » est arrêté et incarcéré le 9 avril. Le 23 avril, le Tribunal Supérieur de Justice du même État lui accorde la liberté considérant son emprisonnement illégal. Questionné sur le sujet, Dom Erwin Kräutler évêque du Xingu (Pará), lui-même menacé de mort, dit que « … la justice est discréditée ». Depuis le 17 avril, le documentaire réalisé par Daniel Junge, intitulé « Mataram Irmã Dorothy » (Ils ont tué Sœur Dorothy), est projeté sur les écrans de plusieurs villes brésiliennes.
*Voir AYA Info No 35
Sources : Agência Brasil et Amazônia.org.
Pour en savoir plus sur le film, une interview de Daniel Junge (en portugais) :

Bernard Comoli avec l’aide de Silvio Cavuscens

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