Lien entre urgence et développement 2.0

Si 2021 a constitué l’année de tous les espoirs pour sortir de la crise sanitaire liée à la Covid-19, elle suppose un retour à la « normale » où l’urgence laisse place au développement. Dans cette perspective, la crise aura laissé quelques enseignements de qualité, notamment dans la construction d’un modèle d’intervention permettant d’intégrer une adaptation en fonction de l’évolution de la pandémie. Modalité en présentiel, semi-présentiel ou à distance ont rythmé la mise en œuvre des projets sur la base d’une approche basée sur la gestion des risques. La pandémie a amené tout un chacun à repenser sa manière de faire, à renforcer ses capacités de résilience…le nexus n’a jamais été aussi évident.

Nexus et grand bargain

A ce propos, fin 2021, l’interagency standing committee publiait son grand bargain 2.0. Dans la volonté de rendre effectif la mise en place du grand bargain. Des priorités ont de fait été dégagées. Le diagnostic des besoins comme prérequis à toute intervention humanitaire, la participation locale comme une révolution et la facilitation pour que les acteurs locaux et nationaux puissent mettre en œuvre une réponse se font omni présents. Il est toutefois conditionné à plus de transparence, de traçabilité, à une responsabilité claire et assumée dans le cadre de partenariats supposant une coordination entre tous les acteurs afin d’atteindre un certain nombre de priorités globales. Les prochains défis du grand bargain pourrait donc se résumer en termes de bonne gouvernance.

Il n’en est pas moins que le grand bargain reste au bon vouloir des bailleurs de fonds. Pour pouvoir le mettre en œuvre, pour que le nexus soit une réalité, l’aide d’urgence doit pouvoir intégrer des mécanismes de développement dans l’optique de changements durables, tout comme la coopération au développement doit pouvoir répondre aux besoins immédiats de ses partenaires locaux en situation de crise sans perdre de vue sa volonté de durabilité et pérennité de son action. L’urgence et de développement constituent deux manières de faire faisant écho à des principes propres, certes, mais ils sont indissociables afin de garantir une résilience aux plus démunis. Quand le désastre, quand la crise devient une possibilité de reconstruire mieux, d’amener plus de moyens pour des changements souhaités et durables, le nexus aura alors pris tout son sens. C’est cette finalité qui devrait guider les bailleurs. Transformer un malheur en opportunité en serait le leitmotiv.

Triple Nexus

Depuis plus d’un an, un certain nombre d’acteurs définissent le nexus à travers 3 pôles. L’urgence et le développement auxquels ils ont ajouté la consolidation de la paix.  

La consolidation de la paix (en anglais : peacebuilding) désigne toute intervention destinée à prévenir la reprise ou le commencement d’un conflit violent en traitant les causes premières identifiées ou supposées et en créant une attente sociétale de résolution pacifique des conflits afin d’aboutir à une paix durable et de stabiliser la société politiquement et économiquement. Les ONG impliquées dans la paix ont commencé à utiliser le terme dans les années 1970. Il a ensuite été adopté par les Nations unies et par les gouvernements avec des sens parfois variables. Un point commun à toutes les définitions est que l’amélioration de la Sécurité humaine est l’objectif prioritaire de la consolidation de la paix. En 2007, le secrétaire général des Nations unies définissait ainsi la consolidation de la paix :  » la consolidation de la paix comporte une série de mesures destinées à réduire le risque de tomber ou de retomber dans une situation de conflit en renforçant à tous les niveaux les capacités nationales de règlement des conflits, et à poser les fondations pour une paix durable et pour un développement économique durable. Les stratégies de consolidation de la paix doivent être cohérentes et adaptées aux besoins spécifiques du pays concerné, prises en compte par ce pays, et doivent comporter un ensemble d’activités relativement limité, soigneusement priorisé et séquencé pour permettre d’atteindre les objectifs fixés. »

D’une manière plus large, elle « se rapporte à un effort de coordination du financement et de la communication, dans le cadre d’une stratégie pluri-sectorielle, entre l’aide humanitaire, l’aide au développement, l’action gouvernementale, la sécurité ; la justice et d’autres secteurs qui ne se considèrent pas toujours comme des secteurs de consolidation de la paix. »[1]

Ce triple nexus fait référence aux conflits armés et ne prend pas ou peu en référence les catastrophes naturelles et crises sanitaires. En focalisant ainsi sur l’instauration de la paix, même si extrêmement souhaitable, ce triple nexus omet toute une partie des interventions d’urgence. Alors que les observatoires internationaux alertent sur une augmentation significative des désastres naturels et alors que la communauté internationale peine à répondre aux défis du changement climatique, et même s’il est pertinent d’inclure les acteurs du peacebuiding dans le nexus, il manque ici un tous les acteurs œuvrant sur d’autres volets de l’urgence, notamment sur les catastrophes naturelles. A moins de considérer que l’humanité dusse faire la paix avec son environnement –une question de rhétorique. Toutefois, d’un point de vue conceptuel, les droits humains constituent sans aucun doute l’élément transversal entre l’intervention d’urgence et la coopération au développement. Un focus permettant à tous les acteurs de se retrouver et de donner du sens au nexus.

Olivier Grobet


[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Consolidation_de_la_paix

Autres liens:

Grand bargain 2.0

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